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Notes d'Itinérances
26 septembre 2022

Castro Pretorio / Piazza della Repubblica (5/15). Effervescence derrière une terne façade.

Une histoire architecturale mouvementée - Une histoire récente qui ne l'est pas moins

 

 

De la piazza del Cinquecento, par les via Cavour et Torino, on accède à l’opéra de Rome situé en limite du quartier voisin de Monti. Le bâtiment, sans grand caractère, déçoit. Ce n’est ni une superbe architecture du XVIIIe siècle, colorée et baroquisante, ni une architecture massive et pompeuse du XIXe siècle. Rien de tel : une grande façade plate de travertin et de briques, percée de neuf très hautes et étroites fenêtres, et précédée, au rez-de-chaussée, d’une colonnade de sept arcades droites surmontée d’un balcon (photo). 

 

La salle a connu une existence mouvementée [1] ! Bâtie en 1879, elle porte d’abord le nom de l’entrepreneur qui la construit, Domenico Costanzi, qui en confie l’exécution à l'architecte milanais de salles de spectacle, Achille Sfondrini. Privilégiant l’acoustique, il conçoit une salle en forme de fer à cheval, accueillant 2 212 spectateurs avec trois ordres de loges, un amphithéâtre et une galerie. Terminé en dix-huit mois, le Théâtre Costanzi est inauguré le 27 novembre 1880 avec la « Sémiramis » de Rossini (créée en 1823), en présence du roi Umberto et de la reine Margherita. En 1926 la ville décide d'acquérir et de restructurer la salle. Appelée « Théâtre de l'œuvre », l’entrée est déplacée sur le côté opposé en créant une petite place qui accueille les spectateurs. À l'intérieur, une quatrième rangée de loges est créée. La seconde inauguration aura lieu le 27 février 1928, avec la représentation de « Néron » d'Arrigo Boito, célèbre par ses livrets d'Othello (1887) et de Falstaff (1893). En 1958, la façade, l’entrée et le foyer sont réaménagés.

 

L’opéra de Rome était plutôt dans l’ombre des autres opéras de la péninsule, Milan, Venise, mais aussi Florence ou Naples. Francesco Ernani, surintendant de l’Opéra, affichait une saison 2008-2009 originale, avec un « Othello » mis en scène par Riccardo Muti et présenté à Salzbourg, une « Aïda » mise en scène par Bob Wilson, une « Iphigénie en Aulide » du même Riccardo Muti. Puis des ouvrages contemporains comme « Jacob Lenz » de Rihm, « Le grand Macabre » de Ligeti, une première européenne pour « For you » de Berkeley et une création mondiale « Il re nudo » de Lombardi ! L’opéra de Rome innovait et prenait des risques. En 2009, Francesco Ernani était poussé à la démission par le nouveau maire de la ville, Gianni Alemanno [2] ! En 2023 / 2024, la programmation comprend des « valeurs sûres » : « Mefistofele » d’Arrigo Boito, « Tosca » de Puccini, « La Flûte enchantée » de Mozart, « L’heure espagnole » de Ravel, « Salome » de Strauss, « La Sonnanbula » de Bellini, « Jenufa » de Janacek, « Otello » de Verdi, « Peter Grimes » de Briten [3]. Depuis 2022, le nouveau directeur  musical de l’opéra est Michelle Mariotti.

 

Riccardo Muti avait assuré la défense de la culture en Italie au pupitre de l’opéra, le 12 mars 2011. A l’occasion des 150 ans de la création de la République d’Italie, était représenté à l’opéra le « Nabucco » (1842) de Verdi. Cet opéra joue un rôle particulier en Italie car il a accompagné la création de l’État italien contre l’Autriche, la papauté et même la France ! Un chœur y est particulièrement important, le chœur des esclaves juifs amenés à Babylone qui pleurent leur défaite et leur pays perdu, « Va, pensiero » [4]que les Italiens connaissent et chantent.

 

« … si je réponds à votre demande de bisser le ‘Va, pensiero’, je ne le fais pas tant ou uniquement pour des raisons patriotiques mais parce que ce soir, pendant que le chœur chantait ‘o mia patria si bella e perduta’, j'ai pensé que si nous tuons nous-mêmes la culture sur laquelle est fondée l'histoire de l'Italie, vraiment, notre patrie sera ‘bella e perduta’ ! ».

 

Riccardo Muti prenait ainsi publiquement position contre les coupes sombres du budget de la culture faites par le gouvernement Berlusconi.

 


[1] Teatro dell’Opera di Roma. « La Storia ». Site internet.

[2] Issu de l’extrême droite. Condamné en 2019 à 6 ans de prison pour corruption dans le scandale Mafia-Capitale.

[3] En 2022 : « Jules César » du compositeur contemporain Giorgio Battistelli, « Tosca » de Puccini, « Luisa Miller » de Verdi, « Turandot » de Puccini, « I Puritani » de Bellini, « Ernani » de Verdi et « Alceste » de Glück.

[4] « Va, pensée, sur tes ailes dorées ; va pose-toi sur coteaux et les collines d’où s’exhale tiède et caressant le doux air du sol natal. Ô ma patrie, si belle et perdue ! Ô souvenir si cher et si fatal ! ».

 

Liste des promenades dans Rome et  liste de la promenade Castro Pretorio / Piazza de la Repubblica

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