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Notes d'Itinérances
1 novembre 2021

La traversée de Rome par le Corso (11/26). Palais et café Ruspoli - Rione Campo Marzio.

Un conspirateur aux "petits pieds"

 

 

A la croisée du largo Goldoni, le Palazzo Ruspoli fut érigé en 1512 pour la famille Jacobilli. Le palais devint la propriété du banquier Orazio Rucellai qui demanda à l’architecte Bartolomeo Ammanati, qui avait réalisé la cour du Palais Pitti de Florence, de terminer les travaux. Les appartements de l’étage abritent une galerie de fresques de Jacopo Zucchi (1541 / 1589) représentant la généalogie des dieux. En 1591, le palais fut acheté par le Cardinal Luigi Caetani qui le compléta par un nouvel étage ainsi qu'un magnifique escalier, constitué de 120 blocs de marbre, et considéré comme l'une des quatre merveilles de Rome. En 1713, il passe à la famille Ruspoli [1].

 

 « Nous avons vu ensuite le palais Ruspoli dont le plus beau café de Rome occupe le rez-de-chaussée ; on est frappé de la magnificence des salles et de leur peu de propreté. Le travail d’essuyer une table de marbre vingt fois par jour est le pire des supplices pour un Romain ; le Français des basses classes, au contraire, se plaît dans l’activité. Différence de la race gauloise et de la romaine » [2].

 

Laissons à Stendhal (1783 / 1817) la responsabilité de ses appréciations sur les qualités respectives des Romains et des « Gaulois » ! Mais, effectivement, pendant une partie du XIXe siècle, jusqu'en 1879, à l'initiative des Ruspoli, une partie du rez-de-chaussée a été utilisée pour des activités commerciales, notamment par le célèbre Caffè Nuovo, l'un des endroits les plus élégants de la ville. 

 

« Le nombre des prêtres français venus à Rome pour suivre le concile est considérable ; on dit que ce sont eux qui se sont montrés les plus actifs. On les voit à toute heure, en tout lieu, dans la Rome antique, dans les églises, dans les sanctuaires, aux catacombes. Dans le seul restaurant établi dans le palais Ruspoli, un soir à l’heure du dîner, nous avons compté cent vingt abbés de nationalité française » [3].

 

Les salles du café occupaient les appartements que le prince Ruspoli avait fait réaménager en 1715. Les peintures murales représentaient des paysages, des vues d‘architecture, des chasses, des batailles, des marines, des nymphes au bain et décoraient des salles de réception, d’audience et d’exposition de la collection d’antiques du Prince. Ces décorations de jardins étaient alors à la mode, transportant ainsi la campagne à la ville ! 

 

En 1823, le palais Ruspoli fut la résidence de la Reine Hortense de Beauharnais, épouse de Louis, frère de Napoléon et ex-roi de Hollande. Il faut reconnaître que le pape, bien que rudoyé par Napoléon, fut plus magnanime et accueillant vis-à-vis de la famille Bonaparte que les cours royales d’Europe qui leur battaient froid. Ils devaient avoir du mal à se remettre de la frayeur que leur avait fait « l’Ogre ». A Rome, Hortense de Beauharnais était accompagnée de son fils, Charles Louis Napoléon (1808 / 1873), futur Napoléon-le-Petit ! Celui-ci ne fut pas très reconnaissant vis-à-vis du pape puisqu’en 1830, il complote avec les Carbonari contre lui dans le projet de le destituer et d’incarcérer tous les cardinaux ! Le même homme, moins de vingt ans plus tard, fera assiéger la République romaine par des troupes françaises en 1849 pour rétablir le pouvoir temporel du pape. En 1830, il s’agissait de conquérir le pouvoir, en 1849 il fallait le conserver avec l’appui du vote catholique !

 

Depuis 1975, le palais et les chefs-d'œuvre qu’il contient font partie de la fondation Memmo, du nom d’un riche homme d’affaires italien. Cette fondation organise des expositions dans certaines des salles du palais : sur l’expressionnisme, le Caravage, les peintres italiens, mais aussi sur les objets trouvés dans la tombe de Néfertari, ou sur Alexandre le Grand [4]. Cela permet de visiter les salles du rez-de-chaussée dont une seule a conservé son plafond à fresques.

 


[1] Les appartements de la Reine Hortense de Beauharnais et de son fils Charles, Louis Napoléon, aménagés en suite, peuvent aujourd’hui être très démocratiquement loués (Residenza Ruspoli Bonaparte).

[2] Stendhal. « Promenades dans Rome ». 1829.

[3] Charles Yriarte. « Autour du concile, croquis et souvenirs d'un artiste à Rome ». 1887.
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