Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Notes d'Itinérances
20 novembre 2013

Cuba, deux ou trois choses à propos de l'ïle du "lézard vert" (30/47). Place del Jigüe – Une béatification improbable.

Plaza Major, autrefois place royale - El Jigüe - Souvenir de Bartolomé de las Casas, défenseur des Indiens

 

Cuba Trinidad Place El Jigue

Non loin de la grande place centrale, la Plaza Major, se trouve une placette ombragée d’un arbre. C’est l’ancienne Place Royale. L’arbre, appelé « El Jigüe » (acacia), y a été planté en souvenir de la première messe célébrée à Trinidad lors du Noël 1513 par le père franciscain Juan de Tesín.

Une plaque rappelle également que le frère Bartolomé de las Casas a vécu à Trinidad et qu’il était un ardent défenseur des indigènes. Fra' Bartolomeo de Las Casas (1484 / 1566) appartenait à l’ordre des dominicains. Chroniqueur, théologien, mais aussi évêque de Chiapas au Mexique en 1544 (tiens, tiens… les habitants du Chiapas tiendraient-ils en partie leurs revendications d’une redistribution des terres et de l’amélioration des conditions de vie des paysans indiens de l’ancienne présence de Bartolomé de Las Cases ?) il joua un rôle important dans l'évangélisation de l'Amérique. Bartolomé de las Casas fut un témoin direct de la colonisation espagnole, il fut même simple colon dans les premiers temps de son installation aux « Indes Océanes », en 1502. Très vite révolté par les crimes commis par les soudards espagnols assoiffés de richesses, il s’engage dans le combat pour la défense des Indiens.

A Cuba, comme en Amérique continentale, les Espagnols n’y sont pas allés de main morte. On estime à 100 000 le nombre d’indiens sur l’île de Cuba lors de sa « découverte » [1] par Christophe Colomb. Ils étaient moins d’un millier en 1524 par suite du travail forcé, des mauvais traitements, des assassinats mais aussi des lâchers de porcs dans l’île pour qu’ils s’y reproduisent librement, lesquels saccageaient les cultures vivrières des indiens les condamnant à la famine.

 « C’est chez ces tendres brebis, ainsi dotés par leur créateur de tant de qualités, que les Espagnols, dès qu’ils les ont connues, sont entrés comme des loups, des tigres et des lions très cruels affamés depuis plusieurs jours. Depuis quarante ans, et aujourd’hui encore, ils ne font que les mettre en pièces, les tuer, les inquiéter, les affliger, les tourmenter et les détruire par des cruautés étranges, nouvelles, variées, jamais vues, ni lues, ni entendues. J’en dirai quelques-unes plus loin ; elles ont été telles que sur les trois millions de naturels de l’Ile Espagnole que nous avons vus il n’y en a plus deux cents aujourd’hui »…

« A cause de leur cupidité et de leur ambition insatiables, telles qu’ils ne pouvaient y en avoir de pires au monde, et parce que ces terres étaient heureuses et riches, et ces gens si humbles, si patients et si facilement soumis, ils n’ont eu pour eux ni respect, ni considération, ni estime. (Je dis la vérité sur ce que je sais et ce que j’ai vu pendant tout ce temps.) Ils les ont traités je ne dis pas comme des bêtes (plût à Dieu qu’ils les eussent traités et considérés comme des bêtes), mais pire que des bêtes et moins que du fumier »[2].

Bartolomé de Las Cases proclame que les Indiens sont des hommes comme les Espagnols, des créatures de Dieu ayant une âme, qui avaient le droit de rester maître de leurs biens et de leurs terres. Au cours des années 1550-1551 ont lieu d’importantes discussions sur la légitimité de la conquête entre Las Casas et Juan de Ginés Sepúlveda. Au colloque de Valladolid (1550), Ginés de Sepúlveda défendait que la guerre est juste lorsqu’elle est ordonnée par l’autorité légitime, faite pour une juste cause et inspirée par une intention pure. Las Casas y répond immédiatement en déclarant que la guerre est injuste à partir du moment où elle est l’instrument d’une oppression

L'archidiocèse de Séville, où il naquit, a lancé le processus de béatification… On attend encore ! Alors que le cardinal Robert Bellarmin, qui instruisit les procès de Giordano Bruno et de Galilée, a été a été béatifié en 1923, canonisé en 1930 et proclamé Docteur de l’église en 1931 par Pie XI !


[1] Marçal Tupai, Indien Guarani : « Cette terre n’a pas été découverte, elle a été envahie ».

[2] Témoignages de Las Casas dans sa « Très brève relation de la destruction des Indes ». 1552.

Liste des articles sur Cuba Ouest.

Télécharger le document intégral

Commentaires
Visiteurs
Depuis la création 988 537