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Notes d'Itinérances
31 décembre 2013

URSS 1988 (14/28). Moscou, capitale du socialisme réel.

Hôtel « Saljut » - Quartiers neufs gagnés sur la forêt - Une organisation planifiée et centralisée de la restauration

 

 

« De tous les coins du monde, on vient à Moscou voir la capitale du premier Etat socialiste »[1]

 

Moscou, la capitale du nouveau monde socialiste, « La Mecque » des communistes du monde entier. Même si la papauté de droit divin est largement remise en cause notamment par les communistes italiens et français, si le culte se lézarde dangereusement avec la sécession de la Pologne, Moscou reste encore une référence au moins pour les autres pays socialistes  !

 

Cette fois, nous ne sommes plus hébergés dans un quartier ancien de la ville, mais dans un quartier très récent, sur une des plus longues avenues de Moscou, l’avenue « Lénine ». L’hôtel « Saljut » est situé à la marge de l’agglomération, sur les nouveaux territoires conquis sur la taïga. De larges avenues se croisent avec ponts et échangeurs entre des alignements de barres et de tours toutes neuves, bien blanches, mais désespérantes dans leur uniformité.

 

Le dernier îlot de ce quartier est en chantier au croisement des deux avenues. Nous avons là un ensemble d’édifices publics dominés par les 21 étages d’un hôtel de deux mille lits. La façade centrale où s’alignent régulièrement des rangées de fenêtres, avec l’auvent de l’entrée s’avançant de 24 mètres et son soubassement de granit donne sur l’avenue Lénine et souhaite la bienvenue aux hôtes arrivant de Vnoukovo »[2].

 

La nature environnante, l’immense forêt de bouleaux argentés, a été déblayée au bulldozer, elle gênait pour la construction des nouveaux quartiers. Des espaces verts seront replantés, plus tard ! Finalement, capitalistes ou pas, les promoteurs immobiliers ont les mêmes réflexes, à l’Ouest comme à l’Est. Les vieux bâtiments, la nature, tout cela n’est pas tiré au cordeau, cela fait désordre, cela gêne pour construire du nouveau, des bâtiments bien alignés, bien ordonnés. La nature ignore les objectifs du plan, elle doit être réactionnaire ?

 

L’organisation des repas dans les grands hôtels est assez originale. Là aussi cette organisation doit être planifiée strictement, comme le reste de l’économie. Les hôtels ne sont quasiment fréquentés que par des groupes de touristes soviétiques ou occidentaux, et de délégations d’entreprises ou de gouvernements. Ils n’hébergent pas de clients individuels. En conséquence, les hôtels régissent l’organisation de la restauration comme des chaînes de production, par groupes entiers, groupes dont les heures de repas, les places dans la salle de restaurant, sont planifiées strictement. Pas question de venir individuellement, plus tôt ou plus tard, et de s’asseoir n’importe où !

 

Comme il est difficile d’étaler la durée du service sur une plage de temps trop longue et qu’il faut néanmoins servir des groupes importants, les salles de restaurant des hôtels sont extrêmement vastes, de véritables halls d’entreprise, afin d’organiser scientifiquement les allers et venues des groupes, des serveurs, et de préparer suffisamment à l’avance les tables et leur service. Quand vous arrivez, tous ensemble dans votre groupe, à l’heure dite, aux tables qui vous sont attribuées, vous croisez les équipes qui ont terminé leur repas, mais vous trouvez votre table mise et le hors d’œuvre déjà servi dans les assiettes.

 

Pas question ici d’adaptation, de précipitation, de stress, d’innovation, d’improvisation. Vous n’entendrez pas, débité à toute vitesse et dans l’attente d’une réponse immédiate :

 

« Et pour ces messieurs-dames, qu’est-ce que cela sera aujourd’hui ? ».

 

Non, le menu est identique pour tous, prévu et distribué à l’avance. Vous êtes prévenu et le serveur ne repartira donc pas en claironnant au travers de la salle :

« Et un bortsch et des zakouskis pour la 7 !».

 

Les serveurs parisiens doivent trouver bien placides, bien flegmatiques, leurs collègues soviétiques. C’est aussi une illustration du socialisme avec ses bons côtés, travail tranquille et faible productivité, et ses mauvais côtés, absence d’individualisation, d’adaptation et faible productivité !

 


[1] « Guide de Moscou et de ses environs ». 1981.

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