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Notes d'Itinérances
8 janvier 2014

URSS 1988 (22/28). Des pâtisseries aux boites à chaussures.

Désormais, règne la ligne droite - Le neuf et le nouveau en architecture

 

 

Après cette débauche de meringues tarabiscotées, Moscou s’est fait une cure de simplicité, de rigueur, de linéaire, de géométrie, mais toujours dans le registre du grandiose et de l’immense, bien sûr.

 

Finies les pâtisseries, cette fois on donne dans le froid, le sévère, l’austère, le dépouillé, la barre bien droite, la tour bien rectangulaire, avec leurs rangées interminables de fenêtres. Ce sont l’hôtel « Intertourist » de la rue Gorki, les barres brisées de l’Avenue Kalinine, la masse de l’hôtel « Rossia » sur la Place Rouge.

 

De temps en temps, les idéologues du Parti ont réussi à intégrer dans l’alliance béton-métal-vitre une fresque d’ouvriers et de paysans, une faucille, une gerbe de blé, une roue dentée, le tout sur fond rouge, nécessité de l’éducation des masses oblige ! Bien sûr, le tout dans la ligne artistique du réalisme socialiste pour que les masses laborieuses puissent comprendre facilement le « message ».

 

Moscou éventré préserve parfois, au milieu des délires staliniens et de ses rêves modernistes, de petites églises blanches à coupoles argentées ou des chapelles de briques rouges à bulbes dorés surmontés des croix de Korsoum.

 

« Une fois dégagée de ses masures, la rue Razine est devenue une espèce de musée d’architecture à ciel ouvert »...

 

Les conditions de salubrité en ont peut-être été améliorées mais, désormais, les charmantes petites églises de la Conception Sainte-Anne, du monastère de l’Apparition et de Saint-Georges-du-Lieu-dit-Pskovskaïa-Gora, toutes trois frêles et minuscules avec leurs bulbes dorés, ou bleu-nuit constellés d’étoiles d’or, semblent dériver au milieu d’un vaste no man’s land face à la falaise lisse et abrupte de l’hôtel « Rossia ».

 

Avenue Kalinine, on donne dans le gigantisme des années 60. Au milieu d’immeubles 1900, ont poussé quatre barres brisées de 25 étages, reliées d’un « stylobate unique long de huit cent mètres », une espèce de longue galerie d’un étage servant à masquer les immeubles anciens qui auraient déparé au long de cette « triomphale » et « majestueuse » avenue. Il paraît que le groupe d’architectes responsable de cette zone monumentale a reçu, en 1966, le Grand Prix du Centre parisien de recherches en architecture « pour avoir élaboré des formes architecturales modernes et pour la mise au point de plans à long terme en matière d’urbanisme ». A mon avis, le jury parisien devait se composer des architectes responsables de la construction de la gare Montparnasse ou du secteur de la Porte d’Italie !

 

Le maire de Moscou, Vladimir Prosmilov, est pourtant particulièrement fier du résultat !

 

« Que d’opinions diverses n’a-t-on pas exprimé sur les nouveaux immeubles de l’Avenue Kalinine ! Combien de fois n’a-t-on pas accusé les architectes et bâtisseurs d’imitation aveugle de l’ouest ! Jetez-y un coup d’œil aujourd’hui ! Elle est pleine de gens venus de tous les coins de la ville pour admirer les immeubles géants où la grâce s’allie à la simplicité et à une grandeur monumentale ».

 

Ah ! C’est qu’il n’est pas toujours très simple pour les contemporains de faire la distinction entre « neuf » et « nouveau ». Car tout ce qui est neuf n’est pas nouveau et, à contrario, des bâtiments anciens peuvent être nouveaux ! Les immeubles de l’avenue Kalinine ont beau être neufs, ils ne sont pas nouveaux, tant il en existe d’autres, similaires, de par le monde, d’une architecture équivalente. La seule « innovation » étant de casser la linéarité des façades en les brisant légèrement, mais toutes de la même manière, pour conserver le caractère grandiose de l’ensemble.

 

Par contre, la Maison de « l’Union centrale des coopératives de consommateurs de l’URSS » de Le Corbusier n’est peut-être pas neuve, car elle date de 1930, mais elle reste nouvelle ! Le bâtiment est érigé sur piliers, avec des façades entièrement vitrées, fenêtres disposées en ruban, toit plat, l’ensemble se voulant particulièrement fonctionnel en accordant la plus grande attention aux circulations dans un bâtiment devant accueillir plus de trois mille personnes.

 

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