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Notes d'Itinérances
15 janvier 2014

Angkor (1/27). Un songe d’enfant.

·         Rêveries sur les images de vieux magazines - "Regards" et "L'Illustration" 

 

 

 “Ta-Prhom… Ta-Som… Neak-Pean… Le Bayon… Il suffit au voyageur qui revient de là-bas de prononcer un de ces noms aux rudes consonances, pour qu’aussitôt apparaissent dans sa mémoire des tours en pyramides, un grand bassin, des piliers, un sanctuaire en ruine sous le treillis des lianes. Mais pour les autres, pour le lecteur qui voyage seulement en songe et pénètre dans la forêt pour la première fois… 

Comment pourrait-il suivre ce touriste fiévreux qui revit ses découvertes, vole de souvenir en souvenir, cherche un instant à reconstruire un temple avec de pauvres mots, et l’oublie aussitôt pour courir à un autre qu’il a reconnu entre les branches. » [1].

« Au fond des forêts du Siam, j'ai vu l'étoile du soir se lever sur les grandes ruines d'Angkor »" [2].

 

Comme Pierre Loti enfant, comme beaucoup d'autres enfants certainement, j'avais rêvé des « mystérieuses ruines d'Angkor ». Dans le grenier de la petite maison de ma grand-mère, nous allions chercher, par une échelle de meunier, des brassées de vieux journaux que nous feuilletions ensemble mon cousin et moi.

 

Cette rêverie avait-elle été alimentée par cette première page du magazine mythique de la presse française d’après-guerre, « Regards »[3], un des premiers magasines à avoir donné une place prépondérante aux reportages photographiques et au photojournalisme ?

 

Elle représentait une danseuse sacrée, tiare pointue à multiples étages sur la tête, ailerons aiguisés aux épaules, jambes écartées, bras étendus, geste des doigts complexe et maniéré. Le cliché était pris devant la grande chaussée d'Angkor Vat avec, en fond d'image, les tours du grand temple. Le papier de mauvaise qualité utilisé à la fin de la guerre, jaune et cassant, la reproduction floue et sombre, devaient rendre le grand temple d’Angkor plus étrange.

 

Où cette rêverie avait-elle été provoquée par cet autre article de Georges Groslier, dans « L'Illustration », sur la découverte du temple de Banteay Chmar[4] comportant de nombreuses photographies des temples envahis par une folle végétation : vastes douves couvertes de végétation flottante, foisonnante, longues galeries courant au travers de la forêt, arbres poussant sur les toitures des tours, animaux mi-hommes mi-oiseaux chevauchant des serpents, élégantes danseuses à la poitrine nue, tours à visages au sourire énigmatique ?

 

J'ai souvenir d'autres illustrations que je n'ai malheureusement pu retrouver et sur lesquelles avait couru mon imagination d’enfant : des voûtes sombres aux piliers ouvragés, des terrasses dominant des cours où poussaient les plumeaux de hauts palmiers, ou des photographies aériennes montrant un entassement de galeries et de tours. Ces immenses constructions cyclopéennes perdues dans la forêt tropicale et redécouvertes plusieurs siècles plus tard étaient propres à susciter les chimères. Combien de films n'ont-ils d'ailleurs pas usé de cette corde ?

 


[1] Roland Dorgelès. « Sur la route mandarine ». 1925.

[2] Pierre Loti. « Un pèlerin d'Angkor ». 1901.

[3] Regards. « Quel sera le sort de l'Indochine ? ». N°7 du 01/09/1945.

[4] L'Illustration. « Banteay Chmar - Ville ancienne du Cambodge ». Georges Groslier. N° du 03/04/1937.

 

Liste des articles sur Angkor.

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