Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Notes d'Itinérances
26 juillet 2014

Sri Lanka, l'ïle dont on rêve (13/37). Les marchands du temple.

Développement du tourisme et du petit commerce associé - Prix et marchandage - En dollars et en francs !

 

 

« Autour des palais, la jungle a été coupée et bientôt pousseront des barrières et l’inévitable kiosque où l’on vendra un jour des tickets qui permettront de contempler la maison des reliques, le bain de Lotus ou la statue du roi Parakrama Bahu auquel la ville dut sa splendeur » [1].

 

Bien évidemment, avec le développement du tourisme, les inévitables kiosques de vente de billets avec leur barrière pour les véhicules, se sont installés. Il faut maintenant passer au kiosque pour acheter ses billets et pouvoir visiter le bain de Lotus, la statue du roi Parakramabahu, ou les sculptures rupestres.

 

Mais toute autre évolution était-elle possible ? N’était ce même pas souhaitable afin d’éviter le pillage des ruines, c’est à dire de ce qu’ont bien voulu laisser les britanniques après qu’ils aient « sauvegardé » les plus belles pièces au British Museum.

 

On peut considérer comme plus contestable l’érection de buvettes, non loin des temples, faites d’assemblage de bois grossier, de tôles, et où trône l’inévitable publicité sanguinolente de Coca-Cola, à côté de celle des productions locales : eau minérale, bière « Lion » ou soda au gingembre. Mais il faut bien que tout le monde vive et il n’est pas toujours déplaisant de pouvoir s’asseoir à l’ombre d’un arbre pour se rafraîchir.

 

Le seul problème, c’est que l’on peut rarement déguster tranquillement sa bière ou son soda sans être entouré d’une nuée de petits vendeurs, mais là encore, il faut bien que chacun puisse vivre. La technique de vente est immuable, semblable à celle de tous les pays du monde. Une sculpture de Bouddha passe ainsi successivement d’une proposition de prix à 500 francs français à 50 $, puis 30… les références du vendeur étant manifestement mieux maîtrisées en dollars. Puis, finalement, au moment du départ, de guerre lasse, il descend à 20 $. En dix minutes, le prix a été diminué par plus de quatre.

 

Notre fils qui ne connaît pas bien les règles de ce « jeu » très particulier - faire celui que cela n’intéresse pas, marchander par désœuvrement, marquer un intérêt pour une pièce pour en acheter une autre, diviser les prix par quatre - se fait attraper régulièrement, payant 100 roupies pour faire garder ses chaussures à l’entrée d’un temple puis, se rendant compte qu’il a trop donné, 10 roupies seulement pour celui qui est venu, intéressé et alléché, lui proposer de brûler de l’huile de coco et se fait prédire un avenir radieux. Une autre fois, il paye 100 roupies une bouteille d’eau qui n’en vaut pas la moitié, ce qui fait « rouméguer » [2] notre chauffeur.

 

A l’atelier de sculpture sur bois qui accueille les touristes par cars entiers, le patron a bien compris que les étrangers aiment voir afficher les prix, aussi tous les objets sont-ils étiquetés en dollars, la monnaie internationale. Toutefois, ce n’est évidemment pas si simple, à l’image des marchands tunisiens qui marquaient un prix pour les touristes allemands mais proposaient aux Français de diviser ce chiffre par deux. Mais ne racontaient-ils pas la même chose aux Teutons ?

 

Ici, même scénario. On nous assure que les prix indiqués le sont pour les touristes américains, mais que, pour les Français, le prix est diminué de 20%. Grâce à une calculette de poche qui ne quitte pas notre mentor, le prix est immédiatement recalculé, d’abord diminué de 20%, puis converti en francs français mais en comptant toutefois le dollar à sept francs ce qui le surévalue la monnaie américaine d’une bonne dizaine de %. A notre moue dubitative, le vendeur nous propose une seconde diminution de 20% sur le prix, ce qui nous fait encore le « Bouddha » plus cher que les 20 dollars de notre petit vendeur. Bref, la force de vente de notre manageur, confortée par la rigueur de calcul mathématique d’un outil électronique, se fonde finalement sur des démarches marketing tout à fait identiques à celle de nos revendeurs à la sauvette ! Malgré tous ses efforts sur l’affichage des prix et l’utilisation de la calculette, il n’aura pas plus de chance.

 

C’est dur le petit commerce avec ces touristes fauchés.

 


[1] André Petit. « Ceylan, l’île dont on rêve ». 1955.

[2] Rouméguer : expression occitane qui signifie,rouspéter, râler, maugréer, du latin « rumigare », ruminer.

 

Liste des articles sur le Sri Lanka

Télécharger le document intégral

Commentaires
Visiteurs
Depuis la création 988 537