Trastevere et Lungaretta (3/19). L’île Tibérine et ses ponts.
Le Ponte Fabricio des quatre têtes - L'ïle Tibérine dédiée à la médecine - Le Ponte Cestio
Le Ponte Fabricio fut construit en 62 avant J-C, c’est le plus vieux pont de Rome [1]. Il est aussi appelé le « pont des quatre têtes ». La légende veut que lors d'une restauration du pont, sous le Pape Sixte V Peretti (1585 / 1590), quatre architectes furent nommés pour réaliser les travaux. Mais ils n’auraient eu de cesse de se quereller. Normal, quatre spécialistes de la même discipline ! Le Pape Sixte V, lassé de leurs querelles, les aurait fait décapiter et ce sont leurs têtes qui orneraient le pont (photo). La légende est dramatique à souhait, pas très favorable aux architectes comme au pape. La réalité est évidemment plus simple et moins tragique : les quatre têtes sculptées sont d'antiques représentations d’Hermès, le dieu gardien des routes et des carrefours. Enfin, c’est Innocent XI Odescalchi (1676 / 1689), et non Sixte V, qui a engagé la restauration du pont en 1679. Le pont Fabricio fut également appelé « Pons iudaeorum », le « pont des juifs », car il reliait le ghetto, originellement situé sur l'île Tiberine et dans le Trastevere, au centre de Rome. Il possède un arc de décharge entre les deux grands arcs principaux.
L’île Tiberine, située dans le rione (arrondissement) voisin de Ripa, est une petite île de la Cité et, comme elle, est consacrée en partie à un hôpital ! Selon la légende, pendant l’épidémie de peste qui sévit à Rome en 293 avant J-C, le Sénat, après avoir consulté les livres de la Sibille, aurait envoyé une délégation à Épidaure, où est situé le principal sanctuaire d'Asclépios, le dieu grec de la médecine. Un des serpents du temple, animal sacré, symbole vivant d’Asclépios, aurait pénétré dans le vaisseau de l’ambassade romaine. A l’arrivée à Rome, il aurait disparu dans l'Ile. Au même moment, l’épidémie de peste se serait arrêtée. En souvenir de ce miracle, manifestement d’origine divine, les Romains édifièrent dans l'île un temple consacré au dieu Esculape (l’équivalent romain d’Asclépios), ainsi qu'un hôpital pour les malades [2]. L’existence d’une sculpture en forme de proue de navire à la pointe amont de l’île a longtemps fait croire que les Romains avaient donné à l’île l'aspect d'un gigantesque vaisseau en décorant les deux pointes de l’île en forme de poupe et de proue, et en l’ornant au centre d’un obélisque figurant le mât [3]. A la fin du XVIe siècle, fut bâti l'hôpital Saint-Jean-de-Dieu, tenu par les Frères hospitaliers. La ville de Rome fut ravagée en 1656 / 1657 par une nouvelle épidémie de peste au cours de laquelle Rome perdit près du cinquième de sa population et l’île servit une nouvelle fois de lazaret. C'est aujourd'hui encore un centre hospitalier.
« Un hôpital se cache dans le voisinage (…) je le découvre après un bref trajet, un vieil hôpital sombre, antre de quelque diabolique docteur Mabuse ou Frankenstein découpant pour leurs plaisir leurs patients en petits morceaux »[4].
[2] Site de l’Université de Caen Normandie. « L’île Tibérine et le temple d’Esculape ». 2019
[3] Hélène Moreau. « Entre deux rives-entre deux ponts : l’île Tiberine de la Rome antique : histoire, archéologie, urbanisme des origines au Ve siècle après J.C ». Archéologie et Préhistoire. Université́ Charles de Gaulle - Lille III. 2014.
[4] Christian Giudicelli. « Quartiers d’Italie ». 1993.
Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur l'île Tibérine et le Trastevere