Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Notes d'Itinérances
28 juin 2021

Sant'Eustachio - Entre Navone et Panthéon (3/14). Plusieurs raisons pour visiter Saint-Louis-des-Français.

Une des églises françaises à Rome - Entre Renaissance et baroque - Le Chevalier d'Arpin, Le Domenicain et Le Caravage

 

 

Passez le long du côté gauche du Palais Madame, gardé par de fiers carabiniers en grand uniforme, pour aller visiter l’église Saint-Louis-des-Français.

Saint-Louis-des-Français est l’une des cinq églises de la communauté française à Rome, mais c’est la première d’entre elles : l'église nationale de la France à Rome. Son érection a été financée par les Rois de France, dont Catherine de Médicis qui connaissait bien l’endroit pour avoir vécu deux ans dans le Palazzo Madama

 

Dessinée par Giacomo della Porta, mais construite par Domenico Fontana (1543 / 1607), l’église fut achevée en 1589. La façade est sobre, de style Renaissance tardive (photo). Elle est composée de deux niveaux séparés par un entablement avec une corniche à ressauts peu marquée, et surmontée d’un fronton orné d’un blason à fleurs de Lys. Verticalement, elle est cloisonnée en cinq parties par des pilastres à chapiteaux doriques au premier niveau et corinthiens au second. L’essentiel de la décoration réside dans les frontons et jambages des fenêtres, et dans quelques niches où sont placées des statues dont celles de François Ier (avec le symbole de la salamandre) et de Charlemagn

 

La façade mérite d’être comparée à celle de l’église du Gesù (1568 / 1584) qui lui est contemporaine mais qui néanmoins annonce déjà un autre style, le baroque. Dans les deux cas, la façade est marquée par deux niveaux séparés par une corniche à ressauts peu marquée, cinq parties verticales séparées par des pilastres mais, au Gesù, les deux extrémités de la partie haute ne sont plus droites, mais ornée de volutes permettant de relier harmonieusement les deux niveaux. Alors que les formes courbes sont encore rares à Saint-Louis-des-Français (haut de niches, demi-fenêtres du rez-de-chaussée, frontons curvilignes sur les portes secondaires), elles sont plus nombreuses au Gesù (grandes volutes, colonnes, niches, frontons curvilignes) en accentuant les reliefs. La façade du Gesù est moins plate, moins statique, plus dynamique.

 

Au XVIIe siècle, les amateurs d’art venaient visiter l’église pour y admirer la voûte de la cinquième chapelle, celle où est enterré le cardinal Matthieu Cointrel (italianisé en Contarelli) et dessinée par le Chevalier d’Arpin. Au XVIIIe et XIXe, leurs successeurs y venaient pour les fresques du Dominiquin (1581 / 1641) sur la vie de sainte Cécile dans la seconde chapelle, le Chevalier d’Arpin étant alors un peu oublié. Très mal éclairées, ces fresques sont aujourd’hui malheureusement peu visibles. Mais, de toute façon, ce ne sont pas pour elles que viennent désormais les fans contemporains d’art et de peinture, mais pour les Caravage de la cinquième chapelle (1599 / 1600). Sic transit gloria mundi. Que viendront y admirer nos petits-enfants ?

 

Au regard de la peinture de l’époque, le chevalier d’Arpin ou les frères Carrache, Le Caravage, sans maniérisme ni bigoterie, n’enjolivait pas les situations ni les personnages. L’utilisation du clair-obscur, de l’ombre, souligne encore le côté réaliste de ses œuvres.

 

 « A propos de lumière, j’ai une dent contre les autorités ecclésiastiques qui, moyennant monnaie (grâce à la fée électricité), permettent de tirer saint Matthieu de ses ténèbres pour un temps chichement mesuré. Dès qu’on commence à en profiter, retour au noir. On pense aux explications d’une prostituée en train de remonter sa petite culotte devant son client frustré : « Comment ? Mais tu avais cent vingt secondes pour jouir… maintenant c’est trop tard » »[1] 

 

Heureusement, la multiplication des aficionados du Caravage permet d’admirer à peu près correctement les tableaux de la chapelle. Il y a toujours un bon Samaritin pour se fendre de 50 centimes d’euro. Si les temps de lumière sont toujours aussi chiches, les autorités ecclésiastiques, mais je crois plus sûrement les autorités françaises, ont disposé une série remarquable de panneaux d’analyse d’une des trois peintures du Caravage, celle consacrée à la vocation de saint Matthieu. C’est très clair et très bien fait et cela mérite d’être souligné et encouragé.

 


[1] Giudicelli Christian. « Quartiers d’Italie ». 1993.

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur Sant'Eustachio

Télécharger le document intégral

Commentaires
Visiteurs
Depuis la création 989 395