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Notes d'Itinérances
5 mai 2018

Cameroun - Années 80 (3/34). Un enseignement agricole en rénovation.

Des objectifs d’accompagnement d’une réforme de l’enseignement

 

 

Après le marchandage avec les porteurs, il faut marchander avec le chauffeur de taxi afin de fixer le montant de la course. Le prix sera fonction du nombre de personnes, de la quantité de bagages, de l’éloignement de l’hôtel, mais surtout de votre richesse supposée. La voiture est évidemment assez déglinguée, les banquettes fatiguées, les portes ferment mal, les vitres sont bloquées mais ça roule et cela roulera encore certainement quelques centaines de milliers de kilomètres et au moins assez pour vous conduire à l’hôtel.

 

Le « Sawa » est un hôtel de la chaîne internationale Novotel, situé à l’entrée de la ville, dans le quartier résidentiel de Joss, en bordure du fleuve, le Wouri. Une plaque de cuivre, sur le mur de la réception, rappelle qu’il fut inauguré par le premier Président de la République du Cameroun, Ahmadou Ahidjo (1924 / 1989). La clientèle est essentiellement constituée d’hommes d’affaires européens, d’experts et de scientifiques. L’air est chaud, humide, moite. Un panneau, à côté de la banque d’accueil, indique la température, dans les trente degrés, et le degré hygrométrique de l’air. Celui-ci est à saturation d’eau et le moindre effort se transforme en transpiration !

 

André Gide terminait son voyage en Afrique à Douala, en mai 1926,  par où nous le commençons. Pendant ses dix mois de « brousse », accompagné de Marc Allégret et de quarante à soixante porteurs, Gide avait lu, ou relu, « L’oraison funèbre d’Henriette de France », « Le Misanthrope », les « Wahlverwandtschaften » (« Les affinités électives »), « Romeo and July », « Cinna », « Iphigénie », le second « Faust », « La steppe », « Au cœur des ténèbres », « Horace ». Pour lui, l’arrivée à Douala constituait un retour à la « civilisation ». En fait, il n’avait jamais intellectuellement quitté « la civilisation occidentale », simplement il retournait physiquement au sein de cette civilisation sous une de ses formes les plus grossières, la civilisation coloniale.

 

« Et quels Blancs ! Laideur, bêtise, vulgarité... Pour moi qui crains sans cesse de déranger autrui, la pensée d’autrui, le repos d’autrui, la prière d’autrui, tant de sans-gêne me consterne d’abord, puis m’indigne » (...) Je voudrais écrire un éloge de la délicatesse » [1].

 

Pour nous, Douala est la porte d’entrée au Cameroun afin d’aller visiter les différentes écoles agricoles dispersées dans le pays. Pour former les cadres de la vulgarisation agricole dont le Cameroun avait besoin, dans les années 1970, le ministère de l’Agriculture a construit, douze écoles d’agriculture sur l’ensemble du territoire national. Ces établissements assurent des qualifications aux niveaux d’agent technique et de technicien agricoles dans des Ecoles Techniques d’Agriculture et de techniciens supérieurs agricoles dans des Collèges Régionaux d’Agriculture. Trois centres régionaux de formation agricole comprenant à la fois une Ecole Technique et un Collège Régional, ont été réalisés avec l’aide de la Banque Mondiale : à Bambili, à quelques kilomètres de Bamenda dans l’Ouest camerounais, à Ebolowa dans le Sud, et à Maroua dans le Nord. Tous ces établissements offrent la particularité de ne former que des élèves-fonctionnaires, rémunérés pendant leur formation et qui, dès l’obtention de leur diplôme, sont immédiatement embauchés dans les différentes structures agricoles publiques. 

 

En 1927, il n’existait que cinq écoles régionales et trente écoles primaires de village pour l’ensemble du pays, accueillant au total trois mille élèves pour une population de deux millions cinq cent mille habitants ! Mais la population a quasiment doublé entre 1927 et 1950 (4,5 millions), puis doublé entre 1950 et 1980 (9 millions). Après l'Indépendance, et plus particulièrement dans les années 70, le nouvel Etat Camerounais a affirmé une volonté de former des cadres pour la vulgarisation agricole auprès des productrices et producteurs agricoles, nombreux et qualifiés, avec la construction de ces douze écoles d'agriculture sur l'ensemble du territoire national. Parallèlement aux constructions d’établissements, le ministère de l’Agriculture a également engagé la réforme des contenus d’enseignement avec l’élaboration de nouveaux programmes, la rénovation des méthodes pédagogiques en accordant une large place aux travaux pratiques, et enfin la formation professionnelle des personnels enseignants afin de les préparer à leurs fonctions. C’est ce dernier volet qui motive nos différentes missions au Cameroun au cours des années 80 et 90.

 


[1] André Gide. « Retour du Tchad ». 1928.

 

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