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Notes d'Itinérances
9 juillet 2019

Monti, entre Cavour et Nazionale, la Suburra (8/11). Santi Domenico e Sisto - La sculpture « Noli me tangere ».

Une histoire sinistre

 

 

Dans l’église Santi Domenico e Sisto [1], la première chapelle en entrant, à droite (côté Sud), a été conçue par Le Bernin. Elle comprend une sculpture imaginée par Le Bernin mais c’est Antonio Raggi, un de ses élèves, qui l’a réalisée entre 1649 et 1652. Elle se nomme « Noli me tangere » (« Ne me touche pas »), en référence au moment où Jésus, après la résurrection dans le jardin de Gethsémani, rencontre Marie Madeleine [2]. La toile de fond représente une tombe vide dans un jardin.

 

En demandant à Marie Madeleine de ne pas le toucher, Jésus indiquerait, qu'une fois la résurrection accomplie, le lien entre l'humanité et sa personne divine ne serait plus physique, mais passerait désormais par le lien de cœur et la foi. 

 

Mais pourquoi ce sujet a-t-il été choisi ? L’histoire de cette sculpture serait assez curieuse. Les chroniques rapportent qu’elle aurait été commandée par Sœur Maria Eleonora Alaleona [3]. On soupçonne que la commande aurait été faite comme un acte de pénitence pour expier un comportement d'un des proches de la famille (ou elle-même) qui serait considéré comme un grand péché : une religieuse aurait essayé de faire introduire son amant dans le couvent !

 

Les faits remonteraient à 1635. Une jeune fille de la famille Alaleona aurait été obligée d’entrer au monastère dominicain de Santa Croce a Montecitorio par ses parents. Comme la jeune fille ne désirait pas prendre le voile, elle aurait demandé à son amoureux de s’introduire dans le couvent pour venir la délivrer. Les deux amants auraient ensuite effectué une « fuga d’amore », pour obliger leurs parents à les marier. Le jeune homme aurait imaginé de s’introduire dans le monastère dans une caisse de café, d’autres chroniques suggérant que ce serait dans un cercueil neuf livré au couvent. Mais le transfert se serait mal passé, la caisse (ou le cercueil) aurait été bloquée et serait restée trop longtemps dans un magasin et l’amant serait mort étouffé. C’était un terrible discrédit pour la famille de la jeune fille et celle-ci se devait de racheter cette faute par un don important. La donation aurait été de 3000 écus romains. 

 

Quant à la jeune fille, pour avoir violé les règles de la congrégation, elle aurait été emmurée dans sa cellule avec juste une ouverture pour lui passer les aliments. En 1640, elle aurait été accueillie dans le couvent de Sancti Domenico et Sisto

 

Si l’histoire est véridique, comment interpréter le thème de la sculpture ? Par cette phrase, Jésus écarte la vie terrestre car il est désormais promis à la vie céleste. Faut-il donc comprendre que la pécheresse n’avait plus qu’à se préparer à la mort ? Ou, que par son acte, elle s’était écartée du seigneur ? Ou encore, que comme Marie-Madeleine, qui avait été une grande pécheresse, elle se repentait de son acte ? L’ouvrage aurait été placé dans la chapelle située à l’entrée de l’église pour que les religieuses du couvent se souviennent de cet épisode scandaleux de la chronique romaine.

 

Ouf, aujourd’hui l’église est devenue l’un des lieux les plus populaires dans le centre de Rome pour les cérémonies de mariage… faisant oublier cette sinistre histoire !

 

Depuis la nef de l’église dite « extérieure » (publique), par les deux petites portes de part et d'autre du maître-autel, on accède à l’église « intérieure » des religieuses, une grande pièce carrée bordée de deux rangées de stalles de chœur en noyer du XVIIe siècle.

 


[1] Romanchurches. "Santi Domenico e Sisto".

[2] Évangile selon Saint-Jean, 20,17.

[3] Les sources sont parfois légèrement différentes. Voir :

Mauro Fioravanti. « La monaca di Roma ». In « Fiamme d’oro – Organo d’informazione dell’associazione nazionale della polizia di stato ». N° 2, mars, avril, mai 2009. 

Alex Gerondino. « San Domenico et la monaca Eleonora ». Roma City Rumors. 16 mai 2018.

L’histoire aurait été racontée par Giacinto Gigli (1594 / 1671) dans ses mémoires connues comme « Le Journal romain ».

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur Monti / Suburra

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