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Notes d'Itinérances
3 juillet 2020

San Saba - Entre parcs et jardins (2/12). Le cirque Maxime et la stèle d'Axoum.

Une visite qui commence par des absences !

 

 

Cette visite du quartier de San Saba commencera à la station de métro Circo Massimo. C’est néanmoins un début un peu étrange car il commence par des absences, des vides : le cirque Maxime et la stèle d’Axoum ! Mais ces vides ont aussi des histoires à raconter.

 

« A la descente du mont Aventin, ne cherchez plus dans la place où était le grand cirque qu’un grand mauvais marais barlong, à qui les restes des fondations des gradins servent de clôture »[1]

 

Situé dans une vallée naturelle entre les monts du Palatin et de l'Aventin, le cirque Maxime était le plus grand cirque de Rome. Agrandi et plusieurs fois reconstruit, le cirque Maxime pouvait contenir plus de 250 000 spectateurs. La piste sur laquelle couraient les chevaux avait plus d'un kilomètre de long. Datant de l'ère de Tarquin, il n’en reste que très peu de choses : une vaste prairie en cuvette oblongue ! Portiques, murets, gradins ont servi de carrière pour les palais de la papauté et les monuments de la Rome baroque quand ils n’ont pas été tout simplement broyés pour faire de la chaux. Sic transit gloria mundi ! 

 

Aujourd’hui lieu de promenade familiale, tranquille, voire de pique-nique, dans un état de semi abandon, le cirque Maxime retrouve de temps en temps les foules de sa gloire passée : pour un concert des Rolling-Stone ou pour une grande manifestation politique ou syndicale. Plusieurs manifestations gigantesques (plus de deux millions de personnes) d’opposition à la politique du gouvernement de Silvio Berlusconi s’y sont notamment tenues avec pour mots d’ordre le refus des restrictions budgétaires, des paradis fiscaux, des politiques anticrises. A chaque fois, la vaste pelouse du cirque était pleine, la foule grimpant sur ses gradins et envahissant les rues adjacentes. Le carrefour situé à l’extrémité du cirque Maxime s’appelle « Place de la Porta Capena », car c’est ici qu’était située une des portes de la muraille servienne, plus ancienne et plus petite que la muraille aurélienne. Le lieu est marqué par un petit édifice, le casino La Vignola, construit en 1538. Le rez-de-chaussée comprend un gracieux portique de trois arches en travertin au-dessus duquel court une corniche décorée de métopes et de triglyphes.

 

Ma Rome « personnelle » comprend un monument qui a complètement disparu du paysage : la stèle [2] géante d’Axoum (ou Aksoum). Cette stèle géante avait initialement été érigée à Axoum, Ethiopie, au sein de l'empire aksoumite qui s’est développé entre le Ier et le VIe siècle de notre ère. Pillée sur les ordres de Mussolini, elle avait été remontée en mars 1937, place de la Porte Capena, devant les nouveaux bâtiments du ministère des Colonies (bâtiments aujourd’hui attribués à la FAO), à côté de la dense circulation de ce carrefour, entre deux sites romains prestigieux, le cirque Maxime et les thermes de Caracalla, et ouvrant sur la perspective du campanile de l’église Santa Maria in Cosmedin puis la coupole de la basilique Saint-Pierre [3]. Son installation fut célébrée le 31 octobre 1937 pour commémorer, à quelques jours près, le quinzième anniversaire de la marche sur Rome. Cet événement s’ajoutait aux célébrations du bimillénaire d’Auguste lequel avait importé les quatre premiers obélisques de Rome. Le « Duce » voulait avoir aussi « le sien » d’obélisque, pour marquer symboliquement la conquête de l’Éthiopie et l’avènement d’un empire fasciste. Bien qu’en 1932 il s’en était déjà offert un d’obélisque, devant le « Foro Mussolini » (aujourd’hui Foro Italico), mais c’était une fabrication moderne, nationale, en marbre de carrare, et celui-ci ne pouvait donc être « à la hauteur » d’un trésor de guerre pris à un ennemi défait !

La stèle géante d’Axoum, un monolithe brisé en cinq morceaux et âgé environ de 1 700 ans, pèse 160 tonnes et mesure 24 mètres de haut. La transporter à Rome sur 400 kilomètres de pistes éthiopiennes de montagne fut une formidable prouesse… qu’il fallut renouveler partiellement quand il fut décidé de rendre l’obélisque à son légitime propriétaire en juillet 2002 ! Après-guerre, le traité de paix signé par l’Italie prévoyait en effet, au chapitre des réparations de guerre, que les pièces du patrimoine éthiopien qui avaient été pillées lui fussent rendues. Démontée en mars 2003, elle devra attendre plusieurs années avant de faire le voyage de retour et d’être remontée, sur son lieu d’origine, en 2008. Ce sont des avions gros porteurs Antonov qui ont réalisé l’essentiel du transport.

 


[1] Président De Brosses. « Lettres d’Italie ». 1740.

[2] Contrairement à l’obélisque, la stèle présente deux larges faces principales et deux de côté plus petites.

[3] Eloi Ficquet.  « La stèle éthiopienne de Rome - Objet d’un conflit de mémoires ». Cahiers d’Etudes Africaines. N°173/174. 2004.

 

Liste des promenades dans Rome et liste des promenades dans le rione de Celio

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