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Notes d'Itinérances
22 décembre 2023

Ripa - Jours tranquilles sur l'Aventin (2/18). L'Aventin.

Un quartier résidentiel tranquille - Mais autrefois un quartier plébéien revendicatif - La fable des « membres et de l'estomac »

 

 

L'Aventin est la plus méridionale des sept collines de la Rome antique. Elle est composée de deux hauteurs distinctes, le Grand-Aventin situé au long du Tibre qui culmine bravement à 46 mètres et le Petit-Aventin, ou Aventin mineur, situé derrière la FAO et les thermes de Caracalla et qui est désormais inclus dans le rione voisin de San Saba. D'après la légende, l'Aventin serait le lieu du haut duquel Rémus scruta le vol des oiseaux, alors que son frère jumeau, Romulus, s’était placé sur le mont Palatin, afin de savoir lequel des deux serait le roi de la nouvelle ville qu’ils allaient créer à cet endroit. Après le meurtre de son frère Rémus, Romulus l’enterra sur l’Aventin.

 

Le premier port de la Rome antique était établi dans la boucle du Tibre, entre les deux collines du Capitole et l’Aventin, au forum Boarium. Aussi la colline de l’Aventin fut-elle occupée par les ouvriers, les artisans, les petits commerçants, les soldats, composant « la plèbe ». Pendant toute la période de la République, l’Aventin resta un quartier populaire situé en dehors du mur Servien. En 494 avant J.C, refusant de répondre à une convocation des consuls pour être enrôlés dans l’armée, le petit peuple de Rome se retira dans le quartier de l’Aventin, faisant ainsi sécession pour y constituer une « autre Rome ». Le refus de cette nouvelle guerre s’ajoutait à une situation économique difficile qui avait abouti au développement de l’esclavage pour dettes auquel étaient condamnés les citoyens les plus pauvres. C’était, en quelque sorte, une « grève insurrectionnelle » et il fallut bien que les consuls, les représentants de la noblesse patricienne, se résolvent à négocier, et à reconnaître une représentation pour la plèbe : les tribuns. Le consul Agrippa Menenius Lanatus, envoyé par le Sénat pour négocier avec les « rebelles », aurait fait un petit discours qui les aurait convaincus.

 

« Un jour [...] les membres du corps humain, voyant que l'estomac restait oisif, séparèrent leur cause de la sienne, et lui refusèrent leur office. Mais cette conspiration les fit bientôt tomber eux-mêmes en langueur ; ils comprirent alors que l'estomac distribuait à chacun d'eux la nourriture qu'il avait reçue, et rentrèrent en grâce avec lui. Ainsi le sénat et le peuple, qui sont comme un seul corps, périssent par la désunion, et vivent pleins de force par la concorde » [1].

 

Le texte est intéressant bien qu’il ait été écrit huit siècles après les faits ! Gageons que les plébéiens auront été plutôt convaincus par la remise de dettes qui aurait été accordée aux plus pauvres et la libération des esclaves pour dettes ! Avec le déplacement du port au Sud de l’Aventin, le petit peuple partit s’installer dans le Testaccio ou vers le Trastevere. La colline de l’Aventin se transforma progressivement en un quartier résidentiel pour la noblesse de l’Empire. Et, comme c’était le quartier le plus luxueux de la ville, comprenant de nombreuses villas, c’est aussi celui qui eut le plus à souffrir des différentes invasions barbares, ce qui explique l’absence quasi-totale de ruines antiques sur la colline [2].

 

Le rione actuel de Ripa est constitué de trois parties distinctes. La plus grande est située, au Sud, sur le mont Aventin. Elle est complétée d’une partie basse, au Nord, au long du Tibre, l’ancien forum Boarium. Quand, à la fin du XIXe siècle, les berges du Tibre ont été fermées par des quais surélevés pour empêcher les inondations brutales et dévastatrices, le port fluvial de Ripa Grande a été fermé, puis les habitations détruites dans les années 1930 afin de dégager les monuments antiques. Troisième partie enfin, plus au Nord, l’île Tibérine.

 

« Nous avons fait quelques promenades ensemble. Un taxi nous déposait Piazza Albania et nous montions sur l’Aventin. C’était l’un des endroits de Rome que le Gros préférait ‘à cause du calme ‘, me disait-il. Il allait regarder par le trou de la serrure du portail de Malte, d’où l’on aperçoit la coupole de Saint-Pierre dans le lointain, et cela provoquait toujours chez lui un fou rire qui m’étonnait » [3].

 


[1] « Apologue des membres et de l’estomac », d’après Aurelius Victor (vers 327 / 390).

[2] Comune di Roma. « Itinerari romani - Il colle della poesia - L’Aventino e dintorni ». Sd.

[3] Patrick Modiano. « Livret de famille ». 1977.

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