Les obélisques de Rome (19/28). 1827 - Viale Fiorello La Guardia (n°16).

Viale Fiorello La Guardia - Quartiere Pinciano 

Dans les années 1600, la colline du Pincio est couverte de parcelles de vignes, dont quelques-unes appartiennent au neveu du pape Paul V, le cardinal Scipion Borghese. Des acquisitions foncières successives lui permettent d’édifier une splendide villa entourée d’un vaste parc. Dans les siècles suivants, villa et jardin subissent de nombreux changements. Marcantonio Borghese (1730 / 1800) rénove entièrement la décoration intérieure de la villa et transforme la troisième partie du parc en jardin à l’anglaise, en créant également un vaste espace à l’image de la place du Palio de Sienne pour y accueillir des manifestations et des festivals (place de Sienne).

Son fils, Camillo Borghese (1775 / 1832), acquiert d’autres terrains et porte le jardin à sa plus grande expansion jusqu'à la piazza del Polopo. Camillo Borghese est général d'Empire et beau-frère de Napoléon Ier car marié avec la seconde sœur de Bonaparte, Pauline, dont la beauté est immortalisée par Canova avec sa statue de Vénus Victrix (1808) installée aujourd’hui dans la Galerie Borghese. En 1826, Camillo Borghese décide de doter les jardins d’une nouvelle entrée monumentale afin de distinguer la nouvelle propriété de l’ancienne. Il confie le projet au célèbre architecte et archéologue Luigi Canina qui propose la création d’une porte spectaculaire de style égyptien antique ! Curieuse proposition pour une ville qui fut capitale de la Rome antique, mais il faut dire que l’Europe est alors en pleine égyptomanie suite au récit de voyage du comte de Volney « Voyage en Égypte et en Syrie » (1787) et à la campagne d’Égypte de Bonaparte, de 1798 à 1801. Celle-ci était doublée d'une expédition scientifique, comprenant des historiens, des botanistes, des dessinateurs, qui accompagnent l'armée afin de redécouvrir les richesses de l'Égypte. Après la chute de l’Empire, cette redécouverte de l’Égypte antique entraîne un véritable pillage des sites archéologiques par les puissances européennes. C’est donc un portique monumental qui est érigé en 1825, à l’entrée du parc, copié sur l'entrée d'un temple égyptien, avec obélisques, pylônes, colonnades et statues de lions, jumeaux, situés de part et d’autre de la Viale Fiorello La Guardia, le tout de couleur rosée à l’imitation du granite d’Assouan (voir photo).

Le frère de Camillo Borghese, Francesco, fait poursuivre les modifications et les embellissements par Luigi Canina qui réalise une autre entrée monumentale du jardin, derrière la piazza del Popolo, laquelle reproduit cette fois les Propylées d’Athènes ! Ils ouvrent sur une voie qui conduit à un lac avec un arc de triomphe à l’imitation de ceux de la Rome impériale, puis d’un temple d’Esculape façon Grèce antique. Le décor du jardin du lac et la place de Sienne deviennent le symbole des fêtes célèbres données par les Borghèse dans les années 1830 / 1840. 

« Il ne connaît pas les tableaux de sa galerie, mais il livre sa galerie au public. Il ne sait point tirer parti d’un parc et d’une villa qui le ruinent, mais son parc et sa villa sont ouverts aux Romains et aux étrangers. Qu’il s’agisse de représenter dans un congrès ou de fêter une restauration des pouvoirs légitimes, il donnera 100 000 francs à son ambassadeur, comme le prince de Piombino, ou il offrira au peuple de Rome un banquet de 1 200 000 francs comme le prince Borghèse » [1].

Cette période fastueuse se termine avec les canonnades françaises lors du siège de Rome, de juin 1849, contre la République romaine lesquels démoliront notamment l’orangerie du jardin Borghèse, mais plus encore avec l’avènement du nouvel État italien en 1870. L’aristocratie papale sera finalement ruinée par la crise immobilière romaine de 1888 et la famille Borghese devra se séparer de ses biens. En 1901, l’État italien achète la Villa Borghese et l’ensemble de ses chefs d’œuvre [2]. Le jardin est ensuite donné en concession à la Mairie de Rome qui l’ouvre au public, en 1903. Une partie de la famille Borghese sombrera dans le fascisme dans la personne de Junio Valerio Borghese (1906 / 1974) qui, après une conduite célèbre pendant la guerre, participera à la traque sanglante des partisans, à la présidence du Mouvement Social Italien et même à une tentative de coup d’État en 1970 ! Sic transit gloria mundi…

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[1] Edmont About. « Rome contemporaine – La noblesse romaine ». 1861.

[2] Giacomo Agosti. « Les chefs-d'œuvre n'ont pas de prix ». In « Actes de la recherche en sciences sociales ». Vol. 66-67. 1987.

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