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Notes d'Itinérances
6 octobre 2021

Algérie au coeur (40/42). Mostaganem et l’Institut de Technologie Agricole.

Une expérience pédagogique marquante

 

 

A dire vrai, en 1970, j’avais déjà croisé la route de l’Algérie... 

 

A ma sortie de l’école d’ingénieurs en agriculture, j’avais postulé pour obtenir un poste de coopérant technique en Algérie. C’était tout à la fois le moyen d’éviter le service militaire et de connaître le pays dont mon épouse, ses parents et sa famille, m’avaient tant parlé. Début juillet, j’étais averti qu’un poste était disponible à l’Institut de Technologie Agricole de Mostaganem, près d’Oran. La naissance prématurée de notre fils avec quatre semaines d’avance, la nécessité qu’il reste un mois en couveuse, nous avait alors fait hésiter à partir : trouverions-nous en Algérie les équipements sanitaires et hospitaliers nécessaires pour un bébé qui risquait d’être fragile ? Une réponse positive n’étant pas assurée, j’avais finalement renoncé au poste proposé.

 

L’Institut de Technologie Agricole (ITA) de Mostaganem était pourtant une expérience tout à fait exceptionnelle. Au lendemain de l’Indépendance, l’Algérie s’était retrouvée dans une situation dramatique d’absence de cadres, en agriculture en particulier, il n’existait en Algérie qu’un seul ingénieur agricole algérien lequel avait été immédiatement bombardé ministre de l’agriculture ! Il fallait donc mettre les bouchées doubles pour former les cadres de l’Etat et de la production dont le secteur agricole du pays avait besoin. L’ITA a été imaginée et mise en œuvre à partir de 1969 par la Caisse Centrale de Coopération Economique de la coopération française en lien avec l’une des toutes premières sociétés françaises d’ingénierie et de conseil en matière de ressources humaines, « Quaternaire éducation ». L’école était dimensionnée pour former six cent à sept cent ingénieurs par promotion, avec une formation en quatre années d’étude qui devait les rendre immédiatement opérationnels. La France apportait son appui à la création et au fonctionnement de l’école avec notamment la mise à disposition d’enseignants et de cadres.

 

Au lendemain des mouvements de mai 1968 qui, en France mais aussi en Europe, avaient fortement secoués les gouvernements ainsi que  le système universitaire jugé traditionnel, voire obsolète, et face à l’ampleur des défis à relever en Algérie, le choix avait été fait d’utiliser des méthodes pédagogiques actives, privilégiant les travaux de terrain, les études en petits groupes et le tutorat par les étudiants plus âgés. Cela exigeait également d’importants moyens pédagogiques (salles, circuit interne de télévision, audiovisuel) pour les cours et les travaux de groupes et individuels, moyens logistiques (transport, hébergement, restauration) pour les études de terrain, et un encadrement nombreux pour assurer les cours, l’animation et l’encadrement pratique.

 

Par la suite, dans mon activité professionnelle, j’ai beaucoup entendu parler de l’expérience de l’ITA par les cadres et responsables algériens même si toutes les composantes de la réussite n’ont pu être réunies : difficultés à obtenir les moyens matériels nécessaires, encadrement pédagogique composé surtout de jeunes coopérants français du service national actif sans expérience professionnelle (ce qui aurait été mon cas !) et qui repartaient au bout de deux ans au moment où ils commençaient à l’acquérir, un autoritarisme administratif qui s’accommodait mal avec l’exigence d’adaptation  et d’autonomie d’une telle expérience. Petit à petit l’ITA est revenu à un enseignement plus classique, basé sur des cours magistraux, avec un enseignement théorique plus que pratique [1].

 

Si l’ITA de Mostaganem fut le lieu de formation de la majorité des ingénieurs algériens de l’agriculture au lendemain de l’Indépendance, il fut aussi une véritable pépinière de spécialistes français de l’éducation dont une partie se retrouvèrent dans les entreprises françaises de formation professionnelle continue. L’expérience de l’ITA a participé au développement d’une expertise française particulière dans les domaines de l’ingénierie pédagogique et de l’ingénierie des dispositifs de formation.

 


[1] Slimane Bedrani. « Contenu du travail et formation dans l'agriculture en Algérie : essai de bilan ». Sd.

 

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