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Notes d'Itinérances
28 janvier 2023

Trastevere et Lungaretta (5/19). Le Trastevere médiéval.

San Benedetto in Piscinula et le Vicolo dell’Atleta

 

 

Au débouché du pont Cestio, sur la droite, les façades d’une maison présentent des fenêtres cintrées ou à meneaux et une loggia médiévale. Ce sont les restes très remaniés d’une maison du XIIIe au XVe siècle, appartenant à la famille Mattei, une puissante famille romaine. Installés de part et d’autre du Tibre, les Mattei avaient obtenu le contrôle du passage sur le fleuve ainsi que celui du ghetto dont ils étaient chargés d’ouvrir les portes le matin et de les fermer le soir. La famille comptait de nombreux cardinaux et avait le titre héréditaire de « Gardien des Ponts et Murs ». Quand le siège apostolique était vacant, les Mattei devaient maintenir l'ordre public pendant la durée du conclave. C’est notamment à un membre de la famille Mattei que l’on doit la « fontana delle Tartarughe », la fontaine des tortues, piazza Mattei, devant leur palais et en bordure du ghetto, sur l’autre rive du fleuve.

 

Derrière la maison Mattei, la piazza in Piscinula tient son nom de l'ancienne présence de piscines des Thermes ou d’un réservoir pour conserver les poissons vivants. L’église San Benedetto in Piscinula s'élèverait sur les vestiges de la demeure de l'importante famille romaine des Anicii, où Benoît de Nursie aurait résidé vers 470… mais ce serait une légende inventée au Moyen-âge ! La construction de l'église remonte probablement vers 1100. Elle possède un campanile en briques du XIe siècle, considéré comme le plus petit  en usage à Rome, avec la plus ancienne cloche de Rome portant la date de 1069. La façade de l’église a été refaite en 1855 dans un style néo-classique. L'intérieur [1] de l'église est resté de style roman original, une nef avec des bas-côtés, avec un dallage de style cosmatesque (XIIe). La disposition intérieure est complexe rendant compte des nombreuses modifications subies par l’édifice original, un vestibule reste de l’atrium médiéval, une nef déviée vers la droite par rapport à l’axe de l’entrée. A gauche, dans le vestibule, s’ouvre une petite chapelle voûtée ; la voûte repose sur quatre colonnes dont les chapiteaux seraient du VIIIe siècle mais la chapelle elle-même date du XIIIe siècle. Elle abrite une icône, Notre-Dame de la Miséricorde, issue d'une fresque du XIVe siècle, sur laquelle l’enfant-Jésus tient dans la main gauche une croix. La tradition veut que saint Benoît ait prié devant cette image… mais celui-ci vivait au VIe siècle, soit huit siècles avant la peinture de l’icône ! La nef comprend quatre colonnes de chaque côté, d’origines différentes, supportant des arcades (photo). Il n’y a plus de plafond et la toiture est directement visible. Des morceaux de fresques du XIVe siècle peuvent être observés sur les murs de l’église.

 

Par la via in Piscinula, on peut rejoindre la via dei Salumi. On tourne à gauche, puis à droite, dans le vicolo dell'Atleta qui rejoint la via dei Genovesi.

 

La ruelle étroite du vicolo dell'Atleta doit son nom à la découverte, en 1844, de la célèbre statue de l'Apoxyomène représentant un athlète en train de se nettoyer après l'effort en se raclant la peau à l'aide d'un strigile [2]. Il s’agit d’une copie romaine d’une œuvre disparue du sculpteur grec Lysippe (IVe siècle av. J-C.) et déposée aujourd’hui au musée du Vatican. Au n°14 du vicolo dell'Atleta, la maison présente une façade en briques avec une large loggia à deux arcades, surmontée d'une corniche décorée d’une arcature. Une des colonnes de la loggia, portant une inscription en hébreu, correspondrait aux restes d’une ancienne synagogue médiévale du Trastevere [3]. L’inscription pourrait faire référence au rabbin Nathan ben Yehiel (1035 / 1106), lequel aurait construit un mikvé (bain rituel) et une synagogue à la fin du XIe et au début du XIIe siècle. Mais, là encore, rien n’est moins sûr ! La maçonnerie daterait de deux siècles plus tard et la présence de caractères hébreux pourrait être liée tout simplement au fait que le Trastevere était le quartier des Juifs au Moyen-Âge. L'une des œuvres les plus connues de Rabbi Nathan ben Yehiel est un dictionnaire talmudique. 

 


[1] Site Roman Churches. « San Benedetto in Piscinula ». 

[2] Après la lutte, les athlètes se nettoyaient le corps enduit d’huile avec un racloir en forme de S, en fer ou en ivoire.

[3] Site Trastevere App. « Vicolo dell’Atleta: storia e leggende ». 2018.

Suzanne Collon-Bérard. « Remarques sur les quartiers juifs de la Rome antique ». In « Mélanges d'archéologie et d'histoire », tome 57, 1940.

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur l'île Tibérine et le Trastevere

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