Parione - Entre Campo dei Fiori et place Navone (21/26). L’oratoire des Philippins.
La bibliothèque Vallicelliana – La fontaine Zuppiera
A gauche de l’église Santa Maria in Vallicella, l'Oratoire des Philippins. Les frères de la congrégation de l'Oratoire organisèrent, en 1637, un concours pour en choisir l’architecte. En signe de modestie la Congrégation avait exigé que ni marbre ni travertin ne soient utilisés pour la décoration du bâtiment, mais souhaité que le bâtiment conserve une apparence imposante à côté de la façade de la Chiesa Nuova. Ils choisirent Francesco Borromini comme architecte à l’issue d’une seconde commission compte-tenu de la fonctionnalité de la distribution entre chapelle, sacristie et bibliothèque. Le corps principal de la façade, légèrement concave, est divisé verticalement en cinq travées par des rangées superposées de pilastres et horizontalement en deux niveaux par des deux corniches à ressauts au relief accentué. Dans la partie médiane, une opposition est faite entre le niveau inférieur, marqué par une légère avancée convexe, et la niche concave à faux caissons du niveau supérieur. Au sommet, le tympan, en adoptant lui-même une forme à la fois curviligne et pointue à son sommet, accentue le mouvement concave et dynamique de la façade.
« Borromini renouvelle plus complètement la typologie traditionnelle en construisant sa façade sur un mouvement plus complexe, convexe concave, et ce qui était jeu plastique devient forme symbolique, image de l’église accueillante ouvrant ses bras aux fidèles »[1].
L’Oratoire des Philippins abrite la bibliothèque Vallicelliana, une des plus belles salles de bibliothèque, devenue publique en 1874. Elle a été créée en 1565 par les Oratoriens car, selon la règle de l’ordre, les pères accompagnaient leurs repas de la lecture et de la discussion de textes religieux. La bibliothèque des Pères Oratoriens, réalisée par Francesco Borromini en 1644, est également connue sous le nom de Salon Borromini. C’est une vaste pièce rectangulaire dotée de 16 fenêtres et d'un balcon donnant sur la piazza della Chiesa Nuova (Santa Maria in Vallicella). Elle fut agrandie en 1665 / 1667 pour acquérir son aspect actuel. Les rayonnages en bois, du XVIIe siècle, sont divisés en deux niveaux, avec des galeries soutenues par des colonnes. L’accès aux galeries s’effectue par des escaliers en colimaçon dissimulés dans chacun des coins de la salle. Le fonds documentaire comprend plus de 130 000 volumes (manuscrits, incunables, livres imprimés et partitions de musique), dont 40 000 volumes imprimés du XVIe au XIXe siècles.
Sur la place située devant l’oratoire, la fontaine, dessinée par Giacomo della Porta en 1581, était à l'origine placée au Campo dei Fiori et était alors composée d'une coupe ovale en marbre blanc sur pied. Excédé par le fait que les commerçants du marché laissaient leurs ordures dans la vasque de la fontaine, le pape Grégoire XV Ludovisi (1621 / 1623) fit poser, en 1622, un « couvercle » en travertin dominé d’une boule. Les Romains la baptisèrent alors « la Zuppiera » (la soupière) compte-tenu de sa nouvelle forme ! Quand la statue de Giordano Bruno a été érigée sur la place du Campo dei Fiori, en 1899, la fontaine a été retirée et stockée dans un entrepôt municipal. Une copie de la fontaine, sans le couvercle, a été remise en 1924, sur un bassin ovale surélevé, alors que la Zuppiera originale est sortie de l’entrepôt municipal pour aller décorer la piazza della Chiesa Nuova (Santa Maria in Vallicella). Autour de la boule située au sommet du couvercle une inscription, insérée d'une main anonyme, affirme : « AMA DIO E NON FALLIRE. FA DEL BENNE E LASSA DIRE. MDCXXII » (Aimez Dieu sans faillir, faites le bien et laissez dire - 1622). L’inscription n’est certainement pas anodine, car elle rappelle que la fontaine était située sur le Campo dei Fiori lieu de supplice de Giordano Bruno et à côté de la potence du supplice de la corda[2] (la corde).
Par la gauche de l’Oratoire des Philippins, on débouche sur la placette dell’Orologio (de l’horloge) du nom du clocheton-horloge de l’oratoire des Philippins qui domine les lieux. Construit par Francesco Borromini en 1648, il est composé de quatre faces, alternativement concaves et convexes, animées par des pilastres corinthiens.
[1] Dictionnaire des Architectes. Claude Mignot. « Borromini (1559-1667) ». 2016.
[2] Le supplicié était suspendu par les bras liés dans le dos aboutissant à la dislocation des épaules et des bras. Le supplice fut infligé dans la Rome pontificale jusqu'à l’occupation de Rome par l’armée de la première République Française.