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Notes d'Itinérances
25 octobre 2023

Pigna - Entre les places de Venise et de Minerve (9/23). La maison professorale des Jésuites et les stances de saint Ignace.

La maison-mère des Jésuites – Une leçon de morale

 

 

La Compagnie de Jésus est une congrégation catholique masculine dont les membres sont appelés « Jésuites ». La Compagnie est fondée par saint Ignace de Loyola en 1539 et reconnue comme ordre religieux par Paul III en 1540. Comme les autres ordres religieux, les Jésuites professent les trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, mais ils prononcent un quatrième vœu qui leur est propre, celui de l'obéissance spéciale au pape. Cela les a conduits à s'engager dans la Contre-Réforme et à orienter leurs activités vers l'évangélisation, la justice sociale et l'éducation. En 1541, Ignace réside dans une vieille bâtisse au centre de Rome en face d’une chapelle dédiée à Notre-Dame de la Route. La Compagnie de Jésus, obtenant la responsabilité de la paroisse, construit sur le terrain vague alentour. Ignace s’installe dans le presbytère dans de petites pièces au plafond bas. Après l’inondation de 1598 qui endommage le bâtiment, il fut reconstruit entre 1599 et 1623 comme siège de la Compagnie de Jésus sur un projet de Girolamo Rainaldi en conservant toutefois les quatre pièces qui avaient constitué l'appartement de saint Ignace et où il est mort en 1556. Le nouveau bâtiment se développe sur les Via d’Aracoeli, San Marco (façade nouvelle, en retrait suite à l’élargissement de la voie en 1932), et degli Astrali, avec des coins en pierre de taille et de beaux portails.

 

Le père général des Jésuites, Gian Paolo Oliva, décida de décorer le couloir qui flanque les quatre pièces de l’appartement de saint Ignace et il commanda l’œuvre au peintre Jacques Courtois, dit « Il Borgognone » (Le Bourguignon). La mort prématurée de l'artiste a laissé l'œuvre inachevée et, à la suggestion du peintre romain Carlo Maratta, le père général des Jésuites a appelé Andrea Pozzo en 1681. Andrea Pozzo (1642 / 1709) est un frère jésuite, mathématicien et peintre connu pour sa maîtrise de la perspective en peinture. Le couloir qui conduit à l’appartement qu’avait occupé saint Ignace a été décoré d'une série de fresques réalisées en fausses architectures, ouvertes sur des espaces qui semblent infinis afin de corriger les petites dimensions du lieu [1].

 

Sur la façade d'entrée du couloir, Pozzo a peint le portrait de saint Ignace, dans un médaillon, au-dessus de la porte. Dessous est écrit en latin « Entrez dans les chambres sacrées de saint Ignace, autrefois habitant, maintenant saint ». Sur les côtés de la porte se trouvent les représentations de deux jeunes jésuites sanctifiés, Luigi Gonzaga et Stanislas Kostka [2]. La porte passée, l’impression est d’entrer dans la galerie d’un palais noble, rythmée par des pilastres de marbre encadrant des peintures (une Sainte Famille, une Madone, le miracle de l'huile de la lampe de saint Ignace dans la grotte de Manresa, saint Ignace libérant un possédé…) et des panneaux avec des vases de fleurs, des angelots. La galerie apparait couverte d’un plafond à nervures et caissons dans lesquels s’insèrent des médaillons, des angelots virevoltants et d’autres peintures. La fin de la galerie semble s’ouvrir une chapelle profonde derrière un arc soutenu de chaque côté par quatre colonnes accouplées ; la chapelle comprend un retable, représentant saint Ignace, devant lequel deux anges musiciens, jouent l’un du violon l’autre du violoncelle. De fait, tout est dessiné et peint sur des surfaces plates !

 

Pour que l’illusion fonctionne parfaitement, l’ensemble doit être observé d'un endroit particulier, à l’entrée de la galerie, marqué au sol par une rose de marbre et correspondant, dans la voûte, à la Gloire du saint. Si l’on observe ces fausses perspectives en sens inverse, du fond du couloir vers le devant, on remarque comment les figures des personnages sont déformées de manière anamorphique, et comment les nervures du plafond semblent être à contre-sens. Bien évidemment, il ne s’agit pas d’un jeu pour l’esprit, tout aussi brillant qu’il puisse paraitre, mais d’une leçon de morale ! La peinture nous rappelle que les apparences peuvent être trompeuses et qu’il faut que les hommes apprennent à s’en délivrer. Il ne peut y avoir qu’une seule vérité, bien évidemment celle de Dieu ! 

 


[1] Collège International de Jésus, Piazza del Gesù, n°45. Visite vidéo sur https://www.jesuites.com/les-chambres-de-saint-ignace-a-rome/

[2] Luigi Gonzaga (1568 / 1591), étudiant jésuite mort au service des pestiférés, et Stanislas Kostka (1550 / 1568), novice jésuite polonais ayant fui sa famille pour entrer chez les jésuites.

 

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