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Notes d'Itinérances
8 février 2024

Sant'Angelo - Autour du ghetto (8/18). La rafle du 16 octobre 1943.

La rafle des Juifs de Rome et le massacre des fosses ardéatines - Un même bourreau : Herbert Kappler !

 

 

Le dernier épisode dramatique de l'histoire du ghetto de Rome eut lieu après le coup d’État du 10 juin 1943 renversant Mussolini. Après la déclaration du Maréchal Badoglio proclamant Rome ville ouverte et la signature, le 3 septembre, d’un armistice avec les Alliés, la communauté juive de Rome pouvait espérer être sauvée alors même que la ville était encore occupée par les nazis. Le commandant SS, Herbert Kappler, ayant menacé d'exécuter 200 otages juifs s’il ne lui était pas remis 50 kilos d'or dans les deux jours, des milliers de Romains anonymes donnèrent leurs bijoux pour sauver les otages juifs réunissant ainsi cinquante et un kilo. Dans sa très grande générosité, le pape Pie XII Pacelli (1939 / 1958) avait fait savoir que l’église catholique était prête à accorder un prêt en or remboursable, si la somme requise n’était pas atteinte [1] ! Reniant leur engagement, le 16 octobre 1943, les nazis envahissaient le ghetto, arrêtant et déportant 2 091 femmes, hommes et enfants, vers Auschwitz et Bergen-Belsen, avec l’aide de la police italienne [2].

 

« Et, en arrivant, elle avait trouvé le quartier désert, les portes grandes ouvertes, personne dans les maisons et personne dans la rue. Personne. Et elle s’était informée, elle avait demandé ça et là, au cafetier aryen. Et elle avait demandé partout. Même le temple qui était désert… et j’ai couru ici et là, de l’un à l’autre… Ils sont au Collège Militaire… à la Stazione Termini… à la Tiburtina… » [3].

 

Seize personnes seulement reviendront des camps.

 

« Cet épisode m’est arrivé pendant que je tournais le court métrage 1943-1997 où l'on voit au début la rafle destinée à arrêter tous les Juifs du ghetto de Rome. Pendant qu’on tournait, une vieille dame s’est évanouie. Évidemment, on a arrêté les prises de vues, elle a été secourue, on l’a amenée dans un bar à côté. Elle s’appelait Spizzichino, elle était une des dernières survivantes de la rafle de 1943, une rescapée d’Auschwitz, elle avait encore le tatouage sur le bras ». [4].

 

Le 24 mars 1944, le commandant SS, Herbert Kappler, ordonna l’exécution de 320 personnes en représailles à l'attentat de la veille, Via Rasella, qui avait fait 32 victimes dans les troupes nazies. Il prit la décision de faire fusiller 10 otages pour chaque soldat allemand tué. Pour atteindre ce nombre, les nazis prirent 270 détenus dans les prisons de Via Tasso et de Regina Coeli, en sus des 50 prisonniers de Regina Coeli, désignés par le préfet fasciste de Rome. Après la mort de l’un des soldats blessés, Kappler ajouta 15 autres personnes pour faire bonne mesure. Elles furent emmenées à la périphérie de Rome, non loin des Catacombes de Saints-Calliste et de Saint-Sébastien, sur la Voie Appia. L’endroit est plus connu sous le nom de « fosses ardéatines ».

 

« Mais au même moment un autre journal est publié, un journal qui paraît encore aujourd’hui et qui s’appelle ‘L’Osservatore Romanò’. C’est le quotidien du Vatican et il y a un curieux article dont les gens parleront encore longtemps. (…) Il y a écrit : ‘32 victimes d’un côté, 320 personnes sacrifiées de l’autre pour les coupables ayant échappé à l’arrestation’.

(…) le journal dit que les personnes tuées aux Ardéatines ont été sacrifiées, comme s’il s’agissait d’un évènement biblique et non d’un crime humain. Dans le journal, les nazis deviennent les victimes et les partisans les coupables… » [5].

 


[1] « Le Saint-Siège a annoncé officieusement que le pape lui-même avait autorisé un prêt en espèces ou des lingots d’une quantité d’or qui ne pouvait être trouvé. La dette pourrait être remboursée par versements, sans échéance ni intérêt ». Robert Katz. « Roma Città Aperta. Settembre 1943-Giugno 1944 ». 2004. Un bel exemple de charité chrétienne?

[2] Carlo Lizanni. Film « L’oro di Roma ». 1961. Traduit en français par « Traqués par la gestapo ».

Anna Francesca Leccia. Film documentaire « La notte più lunga – Rome ville occupée ». 2020.

[3] Elsa Morante. « La Storia ». 1974.

[4] Entretien de Jean Gili, le 27 janvier 2004, avec Ettore Scola sur son film « Gente di Roma » (2003). Il s’agissait de Settimia Spizzichino (1921/ 2000) qui, à son retour des camps, a témoigné régulièrement dans les écoles. 

[5] Ascanio Celestini. « Radio clandestine – Mémoire des fosses ardéatines ». 2005.

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur Sant'Angelo et le ghetto

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