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Notes d'Itinérances
10 septembre 2022

Chroniques tunisiennes 1975 / 2023 (52/69). Un remarquable patrimoine culturel.

Arts et Traditions populaires

 

 

Les touristes qui viennent à Djerba, en formule « tout compris », ne sont pas que des adeptes du bronzage sur la plage comme autant de méduses échouées là. Ce sont souvent des gens modestes, attirés par le prix faible de la prestation et ayant peu l’habitude de voyager à l’étranger. En conséquence, ils n’osent tout simplement pas s’aventurer à l’extérieur de l’hôtel d’autant que les trottoirs peuvent être inexistants, les moyens de transport public mal signalés, les boutiques ou restaurants éloignés. Ils se contentent alors des quelques sorties organisées par l’établissement : une visite aux souks d’Houmt-Souk et une navigation d’une journée sur un « bateau-pirate » !

 

C’est bien évidemment dommage dans la mesure où Djerba ne manque pas d’atouts : de taille réduite, avec un bon réseau routier, tous les sites pouvant être atteints facilement en bicyclette ou en scooter. L’un de ces sites est le musée des Arts et Traditions populaires, installé dans une ancienne zaouïa construite à la fin du XVIIIe siècle en l'honneur des sages Sidi Zitouni et Sidi Ameur, à la pointe Nord-est de l’île. Il a été récemment complété par un bâtiment contemporain dont l’architecture-scénographie intérieure a été confiée à l’agence Leconte-Noirot qui intervient dans de nombreuses réalisations de ce type. Le résultat est intéressant tant par qualité des pièces présentées, costumes, tissages, tapis, poteries, bijoux, boiseries, calligraphie, que par celle de leur présentation muséographique. En outre, divers ateliers d'artisans ont été reconstitués dans la Gubbt-el-Khydal (la coupole aux fantômes), la salle où, paraît-il, Sidi Zitouni recevait les malades mentaux afin de les guérir. Géographiquement à l’opposé, au Sud, près de la ville de Guellala, un autre musée, initiative d’un promoteur privé, n’est pas sans intérêt. Il reconstitue des scènes de la vie économique et sociale avec des mannequins, type « musée Grévin » : fêtes, mariages, traditions, coutumes, artisanat, mythes et légendes, musique traditionnelle. Il offre comme autre intérêt d’être situé sur le point culminant de l’île et donc de proposer un magnifique point de vue. Ce musée serait visité par 100 000 personnes par an, chiffre à rapprocher des 1 500 000 touristes qui séjournent chaque année à Djerba, soulignant ainsi les efforts à accomplir pour « faire sortir » les touristes de leurs hôtels.

 

La côte Ouest de l’île est encore assez sauvage parce que rocheuse et sans plages. Elle ne manque pas de charme avec quelques belles villas éparpillées dont le Centre d’art et de culture « Dar Cherif », à Sidi Jmour, qui s’est donné pour objectif de devenir une plateforme d’échanges entre les cultures. L’idée est séduisante car Djerba a vu passer les Berbères, les Grecs, les Juifs, les Carthaginois, les Romains, les Byzantins, les Vandales, les Arabes, les Normands, les Aragonais, les Ottomans, mais aussi les Espagnols, les Génois, les Français… il y aurait eu pas moins de dix-huit vagues d’émigration sur l’île ! Le centre dispose de salles où ont été présentées, en 2010, les expositions « La femme dans la peinture » et « Ecole de Paris - Ecole de Tunis »), des salles de spectacles (théâtre, musique, chanson, musique soufie, fado, jazz, flamenco), des ateliers d’artistes, des chambres d’hôtes. Un festival de jazz serait à l’étude…

 

« …Djerba, ouvragée comme un plat précieux. Et toutes ces rosaces vertes, ce sont les cimes des palmiers semés au caprice du sable » [1].

 

Au centre de l’île, disséminées dans les oliveraies, il est encore possible de voir les habitations traditionnelles, les « houch ». Les bâtiments sont disposés autour d’un patio central et comprennent des pièces d’habitation et les salles nécessaires à l’activité agricole, remise, écurie, grenier, huilerie. Ils sont généralement couverts de toits plats ou voûtés, voire de coupoles. L’ensemble, refermé sur la cour centrale et entouré de murs, prend l’aspect d’une fortification défensive, le menzel. Autour, on observe généralement une végétation plus dense mêlant plantes du jardin (oignons, piments, tomates), palmiers, arbres fruitiers (amandiers, figuiers, grenadiers), agaves, figuiers de barbarie, non loin du puits. Cet espace, en marge du développement touristique, est néanmoins réinvesti progressivement par les Djerbiens du fait même qu’il est ignoré des investissements publics et privés. Le foncier, d’un coût plus faible, permet la construction de maisons d’habitation dont l’architecture répond désormais à des modèles extérieurs, importés, comparables à ceux des banlieues tunisoises.

 

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