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Notes d'Itinérances
31 mars 2023

Rome, étrange et curieuse (17/45). Rione Regola VII (1) – Le carrosse en feu de la Pimpaccia - Ponte Sisto.

Le pacte de la Pimpaccia avec le diable !

 

 

En 1473, Sixte IV Della Rovere (1414 / 1484) décide de reconstruire un pont sur l’emplacement du pont antique d’Agrippa. La réalisation du Ponte Sisto est confiée à l'architecte Baccio Pontelli et le pont est inauguré pour le jubilé de 1475. Il s'agit d'un pont à quatre arches dont le pilier central possède un oculus pour laisser passer l’eau en cas de crue et réduire ainsi la pression des eaux sur l'ouvrage (photo). Comme pour le zouave du pont de l’Alma à Paris, cet oculus sert aussi de niveau populaire pour mesurer les crues du Tibre. 

 

La légende veut que, tous les 7 janvier, un carrosse en feu tiré par des chevaux squelettiques apparaitrait sur le pont Sisto pour ensuite disparaître dans le Tibre avec les trésors accumulés par « la Pimpaccia », autrement dit Donna Olimpia !

 

Olimpia Maidalchini est née en 1591 d’une famille de toute petite noblesse, peu riche, de Viterbe, (à une centaine de kilomètres au Nord de Rome). Elle refuse de prononcer ses vœux, comme le souhaitaient ses parents qui désiraient éviter d’avoir à payer une dot, en accusant son directeur spirituel de tentative de séduction ! Elle est mariée en 1608 avec Paolo Nini, un riche et vieux propriétaire terrien de Viterbe qui décède trois ans plus tard alors qu’elle est seulement âgée de vingt ans. Désormais très riche, elle épouse en secondes noces Pamphilio Pamphili, plus âgé qu’elle de trente ans et frère du cardinal Giovanni Battista Pamphili. La famille Pamphili était de haute noblesse romaine bien qu’appauvrie.

 

En 1639, Olimpia est veuve une seconde fois et, en 1644, son beau-frère, Giovanni Battista Pamphili est élu pape sous le nom d’Innocent X (1644 / 1655). Ayant la confiance du souverain-pontife, Olimpia joua alors un rôle-clef sous le pontificat de son beau-frère, filtrant les visites auprès du saint-Père, intervenant dans les nominations à la Curie, favorisant les uns, écartant les autres, cherchant avec avidité à s’enrichir en vendant des faveurs. Ce qui fit proclamer à Pasquino :

 

Pour ceux qui veulent une grâce de la part du souverain
Dur et long est le chemin du Vatican,
Mais s’il est une personne astucieuse
Il court voir Dona Olimpia, les mains pleines,
Et ce qu’il veut, il l’obtient.
C’est le chemin le plus large et le plus court [1].

 

La vindicte et le ressentiment populaires à l’égard de Dona Olimpia se traduisirent par le surnom qui lui fut donné, la « Pimpaccia » [2], et par la légende qui lui a été forgée. Sous le lit du pontife mourant celui-ci aurait fait placer deux grand coffres remplis de pierres précieuses et de pièces d’or accumulées au cours de son pontificat. La Pimpaccia assiste son beau-frère pendant son agonie et, quand l’heure de la mort approche, elle veut s’emparer des coffres mais ceux-ci ne bougent pas. Elle implore alors le diable qui l’aide à transporter les coffres dans une voiture en flamme, tirée par des chevaux squelettiques et l’affreux cortège traverse Rome en direction de la villa Pamphili et disparaît dans le Tibre en passant sur le pont Sisto. Chaque 7 janvier, jour anniversaire de la mort d’Innocent X, mais aussi les nuits de pleine lune, le fantôme de Donna Olimpia réapparaitrait dans son carrosse de feu et disparaîtrait dans le Tibre où les diables la ramèneraient en enfer. Ce qui semble certain, c’est qu’aucun membre de la famille n’aurait participé au financement de l’enterrement d’Innocent X dont la dépouille serait restée plusieurs jours sans sépulture. Le nouveau pape, Alexandre VII Chiggi (1599 / 1667), exila Donna Olimpia à San Martino al Cimino (petit village situé au nord de Rome) en lui demandant de restituer les valeurs emportées ce qu’elle aurait refusé de faire. Olimpia Maidalchini est décédée deux ans plus tard, vraisemblablement de la peste. 

 

Le pire tort de Donna Olimpia aura été de se comporter de la même manière que les hommes les plus puissants de son temps, ce que la morale publique ne pardonnera pas à une femme.

 


[1] Per chi vuol qualche grazia dal sovrano / aspra e lunga è la via del Vaticano. / Ma se è persona accorta / corre da Donna Olimpia a mani piene / e ciò che vuole ottiene. / È la strada più larga e la più corta

[2] Pasquino lui a donné ce surnom en déformant le titre d'une célèbre comédie de 1600, « Pimpa », dont la protagoniste était despotique, intelligente, présomptueuse et à l'esprit ouvert. Voir le site de Roma Segreta.

 

Liste des promenades dans Rome  et liste des promenades dans Rome étrange et curieuse 2

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