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Notes d'Itinérances
7 septembre 2023

Ostiense - Révolution au sud de Rome (6/12). Les Entrepôts généraux, le gazomètre et les Halles.

Des symboles du développement industriel romain en 1900

 

 

Retour à la via Ostiense par la via del Commercio. La croissance démographique de la capitale au tournant du XXe siècle exigeait l’existence d’entrepôts pour assurer le stockage et la conservation des marchandises en transit. Le complexe, construit au début de la rue, était composé de quatre grands bâtiments de cinq niveaux (souterrain, rez-de-chaussée et trois étages) à proximité du fleuve, de deux autres de deux étages du côté opposé et de six remises [1]. Les produits périssables étaient entreposés dans des locaux réfrigérés. Fermés en 1984, les locaux servent à des activités de danse, rap, hip-hop. La rue longe ensuite un des symboles du quartier, le Gazometro, et deux autres œuvres de Street Art sont visibles, une peinture murale abstraite (2012) de Momo et « Paint over the cracks » (2011) de Kid Acne… Le grand gazomètre, construit entre 1935 et 1937, est flanqué de trois plus petits érigés en 1910 et 1912. Il ne reste aujourd'hui que l'enveloppe extérieure de la structure, la cuve de 200 000 m3 qui montait ou baissait selon la quantité de gaz stockée ayant été démontée (photo 1935). L’utilisation du gaz était alors celui de l’éclairage urbain.

 

« Les États pontificaux ne brillaient certainement pas par le désir d’innovation. La modernité, dans toutes ses manifestations, est considérée avec suspicion, sinon avec une aversion déclarée. (…) Le pape Grégoire XVI Cappellari (1831 / 1846) commentera l’avènement de l’éclairage au gaz comme une interférence humaine dangereuse dans l’alternance naturelle du jour et de la nuit, un peu moins qu’une attaque contre l’œuvre du Créateur. Son successeur, Pie IX Ferretti (1846 / 1878), au moins au début, pense différemment et annonce peu après son élection un appel d’offres pour l’éclairage au gaz de la Ville éternelle » [2]. 

 

Encore fallait-il produire du gaz de coke ce qui impliquait d’avoir des réseaux de transport de coke ! Or la Rome papale était dépourvue d’infrastructure industrielle et les 44 premiers lampadaires ne seront allumés qu’en 1854. C’est le nouveau régime, établi en 1870, qui permit le développement de l’éclairage au gaz grâce à un double réseau de transport, fluvial par le Tibre, ferroviaire par la liaison Ostiense-Termini. La transformation de la zone d'Ostiense en zone industrielle et de services stratégiques sera décidée sous la magistrature d’Ernesto Nathan (1907-1913) avec l'adoption d'un nouveau plan directeur en 1909. En quelques années, de grands travaux furent lancés : les nouvelles usines de production de gaz de la Société anglo-romaine (1910), le nouveau port fluvial (1912), les entrepôts généraux (1912), l'usine électrique de Montemartini (1912), le consortium coopératif agricole (1919), les halles (1921), la ligne de chemin de fer Rome-Ostie (1924) [3].

 

La Via Ostiense avait été choisie pour y ériger les halles (Mercati Generali – Marchés généraux). Elles comprenaient deux secteurs, l’un pour les fruits et légumes, l’autre pour la viande, les œufs, le poisson. Les halles couvraient une surface de 138 000 m2 et étaient desservies par une voie ferrée. Les magasins généraux ont été fermés en 2002. En 2005, des travaux de réaménagement ont commencé́ pour la création d’une « ville des jeunes », avec un projet confié à l'architecte néerlandais Rem Koolhaas. Il comprenait un espace commercial, une place, un auditorium de 2 400 places, une résidence étudiante, des bars et restaurants, un espace vert, une bibliothèque, un centre pour personnes âgées, un cinéma et divers bureaux publics. Le projet a été dénaturé par la municipalité de Gianni Alemano (2008 / 2013 - extrême droite), en doublant les surfaces commerciales, supprimant l’auditorium, diminuant les espaces verts, entraînant le retrait de l’architecte et des financeurs. Les municipalités suivantes ont proposé des variantes, mais très dénaturées par rapport au projet original et avec des objectifs spéculatifs voire de la corruption [4]… Tout est arrêté depuis.

 


[1] Giuseppe Stemperini. « I Magazzini generali di Roma: dai progetti ottocenteschi al declino ». In « Roma moderna e contemporanea - Rivista interdisciplinare di storia ». 2012.

[2] Corrado Augia. « Il colosso di ferro - L’illuminazione, l’industria e la modernità̀. Breve storia del colosso di ferro ». ENI. 2022.

[3] Patrizia Sfligiotti. « Quartiere Ostiense - Il passato industriale di Roma ». In « Tuti Europa Ventitrenta ». 20/06/2021.

[4] Luisa Urbani. « Dentro gli Ex Mercati Generali di Roma. Dopo vent'anni è solo una grande discarica a cielo aperto ». In RomaToday. 11/07/2023.

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