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Notes d'Itinérances
22 novembre 2023

Viêt-Nam - 1995 / 2023 (2/27). Premiers pas difficiles à Hanoi.

Se promener en ville confronte à des difficultés inédites

 

 

En août 1995, l’arrivée à Hanoi s’effectue dans un tout petit aéroport, quasiment un aéro-club ! Les formalités de police sont réalisées calmement et sans grand intérêt apparent par un policier placide. Dans la salle voisine les bagages s’entassent dans une sympathique pagaye. Nous sommes attendu à la sortie de l’aéroport, direction l’hôtel. Nous ouvrons tout grand nos yeux comme pour tout vouloir saisir, appréhender, comprendre. Sur les routes la circulation, essentiellement composée de vélos et de quelques mobylettes, est extrêmement dense. Si on n'y roule pas très vite, on a l'impression que l'on va heurter et renverser un cycliste à chaque mètre. De plus, elle est terriblement bruyante car le klaxon sert de mode de communication pour toutes les situations : j’arrive, je veux passer, je tourne, je double…

 

Nous sommes hébergés dans un petit hôtel du centre-ville, un de ces mini-hôtels qui se multiplient au Viêt-Nam : il est de la largeur d’une chambre en façade, sur deux ou trois étages, mais il s’étend en profondeur avec plusieurs bâtiments séparés par des courettes, et l’hôtel finit ainsi par compter une douzaine de chambres.

 

Dès les bagages posés, nous nous lançons dans la ville.

 

Première difficulté : marcher sur le trottoir ! Celui-ci semble plutôt servir de salle-de-séjour à toute la population du quartier. On y cuisine sur de petits fourneaux en terre ; on y mange, assis sur les talons ou sur de petits bancs ; on y joue, on s’y amuse avec les enfants ; on y discute en petits groupes ; on y nettoie son vélo ou sa mobylette ; les enfants y font leurs devoirs ; on y fait toutes sortes de commerces aussi. Il faut donc slalomer entre différentes scènes de vie familiale, avec l’étrange impression de violer l’intimité de ces existences offertes sur le trottoir. Peut-être conviendrait-il de s’excuser de notre familiarité et de notre intrusion dans le secret de chacun de ces foyers sans les avoir précédemment avertis ? Mais où est la sonnette pour annoncer notre arrivée ?

 

Seconde difficulté : traverser la chaussée ! Le flot de vélos, de cyclo-pousses et de mobylettes est si dense qu’il ne semble pas possible de se faufiler en son sein. Nous hésitons, avançons, reculons, courons, mais chacune de ces opérations semble être une erreur tactique susceptible de provoquer des catastrophes en chaîne. Après deux ou trois expériences difficiles et dangereuses, nous observons comment procèdent les autochtones : ils se jettent sur la chaussée et traversent sans regarder ni à droite, ni à gauche, mais en conservant un pas parfaitement régulier, sans jamais ralentir ou se mettre à courir. Et cela réussit ! Les deux roues à pédales ou à moteur, et les trois roues des cyclo-pousses, anticipent l’avancée des piétons et les contournent sans heurts. Finalement, en Europe, le piéton anticipe le mouvement des véhicules et se glisse entre les véhicules ; ici, c’est l’inverse à tel point qu’au milieu des carrefours du centre-ville, des enfants jouent au cerf-volant ! Une fois la règle découverte, cela reste néanmoins plus facile à dire qu’à faire ; avec nos réflexes européens, il nous est bien difficile de nous lancer dans la circulation sans regarder craintivement à gauche et à droite et sans modifier notre allure en fonction du danger.

 

D’intrusions dans les cercles de famille sur les trottoirs, en dangers encourus sur les chaussées, nous finissons par aboutir au centre de Hanoi, au lac Hoan Kiem, le lac de l’épée restituée (photo). Nous sommes passés dans le quartier des 36 Guildes [1], par les rues des merciers, des ferblantiers, des bijoutiers. Comme Roland Dorgelès [2] le décrivait, en 1925, les étroites échoppes se pressent toujours l’une contre l’autre dans des rues regroupant chaque corps de métiers : soie, mercerie, vermicelle, chaussures, sucre, poissons grillés, chanvre... Toutefois les étals et les activités ont parfois évolué, par exemples, la rue des ferronniers est désormais éclairée par les lueurs bleutées des chalumeaux oxhydryles, la rue des pharmaciens étale ses vitrines remplies de petites boîtes cartonnées bleues, vertes ou rouges et, partout, s’étale la pacotille des ustensiles en plastique aux couleurs criardes.

 


[1] 2023. Le Vieux quartier de Hanoï comporte 76 rues, dont 47 environ ont conservé leur dénomination ancienne commençant par le mot Hàng (marchandises), Hàng Dào (rue des teinturiers de la soie rouge), Hàng Duong (rue du sucre), Hàng Thiêc (rue des Ferblantiers), Hàng Ma (rue des objets votifs), etc. Aujourd’hui, le Vieux quartier change avec le développement économique et l’arrivée de touristes (cafés, restaurants, magasins de souvenirs), mais en conservant ses trotoirs encombrés où se déroulent mille activités... 

[2] Roland Dorgelès. « Sur la route mandarine ». 1925.

 

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