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Notes d'Itinérances
31 mai 2014

Cuba, oriente (27/34). Une vieille ville toute neuve.

Une rénovation assez remarquable - Des critiques légitimes qui peuvent s'appliquer aussi chez nous !

 

 

Mais voilà que les mondes d’antan sont de plus en plus modernes ! La vieille ville de La Havane, que nous avions quittée en pleins travaux en 2008, n’en a pas pour autant remisé ses échafaudages et ses palissades. Le marteau piqueur, la truelle ou le pinceau, outre qu’ils ont participé à la rénovation de plus d’un nouveau bâtiment remarquable, s’attaquent maintenant à de nouveaux objectifs.

 

La piazza vieja ne mérite plus tout à fait son nom tant elle étale une nouvelle jeunesse insolente, les docks rouillés et croulants du port sont transformés en hall d’exposition artisanale et artistique, et même le barrio San Isidro est grignoté progressivement à son tour par les rénovations.

 

Les restaurants, les hôtels, les musées, les galeries d’art, voire même les boutiques de luxe pour la nouvelle bourgeoisie, mais aussi un planétarium, les écoles, les dispensaires, investissent les rez-de-chaussée des immeubles. Après la création d’une maison de la Bolivie, la Wallonie a ouvert une vitrine de ses productions dans le palazzo San Esteban du XVIIe siècle, lequel s’est refait, pour l’occasion, une beauté pour l’accueillir. Le Sénat français n’est pas en reste qui a créé une « Maison Victor Hugo » pour participer au rayonnement de la culture française.

 

 « … la rue Obispo corrigeait ses défauts et commençait une nouvelle vie en dansant au son métallique et pas du tout lyrique du dollar : les vieilles boutiques, les bars, les cafétérias, les librairies avaient rouvert leurs portes oxydées, fermées pendant des années, pour révéler une surprenante abondance de produits, non soumis au rationnement, qui s’offraient cruellement contre des dollars » [1].

 

Cette fois, avec l’Euro, la transformation est encore plus radicale que celle qu’avait connue la rue Obispo dans les années 90/2000.

 

Les esprits chagrins ne manqueront pas de souligner que, dans la nouvelle « vieille Havane », l’abondance des produits s’offre toujours aussi cruellement à des regards qui ne peuvent les acquérir faute d’accès aux pesos pour touristes, les CUC. Ils souligneront avec ironie combien les articles « d’art » sont standardisés aux goûts parfois douteux des touristes internationaux. Ils prendront plaisir à montrer que beaucoup de ces surfaces restaurées bénéficient en priorité aux étrangers et non pas aux populations locales.

 

Ces remarques ne sont pas dénuées de bon sens. Si l’utilisation des rez-de-chaussée est plutôt réservée à des fins commerciales et de services, les étages supérieurs sont généralement consacrés à des logements sociaux disposés autour des cours intérieures des bâtiments.

 

Comparons avec ce qui se passe lors de la restauration du quartier du Marais à Paris ou celle des vieux quartiers des grandes villes européennes ? Les populations pauvres n’en sont-elles pas chassées sans ménagement vers de lointaines banlieues ?

 

En conséquence de cette restauration de la vieille Havane, la densité de population des immeubles et quartiers rénovés diminue, affaiblissant leur caractère populaire et vivant, tellement « photogénique ». Heureusement, les instituteurs continuent à utiliser les rues pour leurs cours de gymnastique ou de secourisme au milieu des parents admirant leur progéniture et des touristes étonnés !

 


[1] Leonardo Padura. «  Le palmier et l’étoile ». 2001.

 

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