Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Notes d'Itinérances
2 juin 2016

Luanda, la perle de l'Afrique (18/26). Se restaurer à Luanda en temps de guerre.

Peu de restaurants – Pas nécessairement facilement accessibles

 

 

Au Tropico, j’ai retrouvé le restaurant du onzième étage, qui domine la baie de Luanda d’un côté, et la ville de l’autre. Les convives sont seulement un peu plus nombreux qu’au début de la décennie, signe que si ce n’est pas encore tout à fait la paix, ce n’est plus tout à fait la guerre. Les experts, ingénieurs et techniciens reviennent travailler sur des projets de développement. J’ai retrouvé aussi ma batterie de couverts, cuillère à soupe, petite cuillère, fourchette, fourchette à poisson, fourchette à dessert, couteau à viande, couteau à poisson, couteau à dessert, et le vaste buffet en libre-service, soupe, salades de tomates, de haricots, de poivrons et d’oignons, de « bacalhau », croquettes de poisson, de viande, de fruits de mer, filets de « garouba », tournedos, pommes de terre sautées, pommes de terre à la vapeur, haricots verts, riz, pommes, bananes, papayes, glaces, gâteau à la crème chantilly, gâteau meringué, flans au caramel, tartelettes et crème au chocolat ! Ajoutez à cela en soirée, cerise sur le gâteau, deux guitaristes jouant « jazzy » de bonnes vieilles rengaines.

 

Au déjeuner, il y a aujourd’hui plus de serveurs que de clients. Une vingtaine de personnes au total, entre un maître d’hôtel en chef tout de noir vêtu, des maîtres d’hôtel en second en vestes blanches, des serveurs et serveuses en gilets verts, alors qu’on ne compte pas quinze clients dans la salle. Aussi tourbillonnent-ils autour des consommateurs, remplissant votre verre dès que vous avez bu une gorgée, vous redisposant les couverts en fonction du contenu de votre assiette et faisant disparaître prestement celle-ci dès la dernière bouchée avalée. Ils sont bien sûr d’autant plus nombreux autour des convives, jusqu’à trois ou quatre, que ceux-ci apparaissent plus exigeants. A une table voisine, une dame est particulièrement entourée. Habillée d’une jupe longue de petits carreaux de vichy rose et d’une veste d’un vert électrique, elle est interminable comme un jour sans pain et semble porter sur ses épaules toute la misère du monde. Deux à trois serveurs l’entourent constamment avec empressement et paraissent lui faire de nombreuses propositions auxquelles elle ne prête nulle attention, continuant à picorer dans son assiette d’un air triste et las. A un gradé angolais en battle-dress bleu horizon qui vient la saluer respectueusement, elle répond par un hochement de tête accablé. Qui est-ce ? Mystère des rencontres fortuites.

 

Le plus souvent, l’étranger de passage est condamné aux restaurants de la trilogie Tivoli-Tropico-Presidente. Certes, comme on le voit, la condamnation n’est pas très lourde à porter, encore que l’on aimerait bien, de temps à autres, changer de crémerie. Mais cela n’est possible qu’à condition d’avoir une voiture à sa disposition tant les possibilités de restauration sont rares sur Luanda et exigent de faire de longues distances sur des trottoirs dangereux, bouches d’égouts ouvertes, tranchées de travaux non signalées, ou même plus simplement monceaux de détritus, revêtements détériorés et grandes flaques d’eau nauséabonde.

 

Dans le haut de l’avenue commandante Che Guevara, dans une villa au coin d’une rue, une famille d’origine portugaise a installé un petit restaurant familial. Une douzaine de tables dans l’ancienne salle de séjour permettent d’accueillir une quarantaine de convives au maximum. Comme il y est servi une bonne cuisine familiale, notamment d’excellentes brandades de morue, la salle est toujours pleine de cadres et techniciens de chantiers.

 

Ce sont aussi, dans le quartier de la résidence Elf, derrière un portail que rien n’indique, un petit restaurant tranquille ou, sur l’île, derrière le fort Saint-Michel, un restaurant chinois, sans parler des gargotes poussiéreuses de l’île. C’est encore, mais je ne sais plus où, un grand restaurant sous un toit de tôle plein d’expatriés avec leurs téléphones cellulaires, ou le ranch Gimunalu à Funda, en limite de la zone à ne pas dépasser. Les étrangers viennent y faire du cheval et déjeuner d’un plat de « Calulu », une boule de farine de manioc avec du poisson bouilli et du gombo, un légume vert rempli de petites boules blanches et gluantes, plus des haricots rouges, le tout saupoudré de manioc séché et râpé.

 

« Excellente cuisinière, elle lui préparait des calulus et des muzonguês, de petits gâteaux de coco et des douceurs aux cacahuètes. Tu finiras par engraisser avec moi, pour que tout le monde voie comment ton Ermelinda te soigne bien »[1].

 

Commentaires
Visiteurs
Depuis la création 989 841
Promenades dans Rome