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Notes d'Itinérances
18 septembre 2020

Esquilino et Monti Nord - Des perles dans un écrin banal (10/13). Monti – Le parc archéologique du Colle Oppio.

Trois niveaux à sauvegarder, le jardin et deux couches archéologiques

 

Rome Monti Nord Parco del Colle d'Opio

En 1879, la princesse Mary Elisabeth Brancaccio, née Field, d’origine américaine, achète à la municipalité de Rome l'église, le couvent, le potager et le parc de Santa Maria della Purificazione ai Monti. Ces biens avaient été confisqués par l’État suite à la suppression des ordres religieux et des congrégations par les lois de 1866 et 1867, lois étendues à la ville de Rome en 1870. Le vaste parc de la congrégation était situé sur le site des thermes de Titus et de Trajan et de la Domus Aurea de Néron.

En 1935-1936, une grande partie du parc a été expropriée afin d’y aménager un parc archéologique public, le Parco di Colle Oppio, dessiné par l’architecte-paysagiste Raffaele de Vico avec l’historien de l’art Antonio Muñoz [1]. Le parc, situé sur le flanc de la colline de l’Oppius romain, est un site archéologique remarquable depuis la fin du XVe siècle. Dans la colline, alors plantée de vignes et de vergers, vers 1480 / 1490, un jeune homme était tombé dans un trou découvrant ainsi une des salles de la Domus Aurea de Néron. C’était un immense palais (80 hectares), construit entre 64 et 68, richement orné et décoré de peintures exceptionnelles qui seront alors connues sous le nom de « grotesques » car découvertes dans des « grottes ». Il s’agit de motifs d’ornementation reproduisant des sujets étranges, avec des enroulements de feuillages, dans l’entrelacement desquels apparaissent des personnages ou des animaux fantastiques. Tous les grands artistes de l’époque, de Raphaël à Michel-Ange, visitèrent les salles souterraines et s’inspirèrent de ces peintures antiques. 

« Dans le reste de l’édifice tout était couvert de dorures, rehaussé de pierres précieuses et de nacre. Le plafond des salles à manger était fait de tablettes d’ivoire mobiles et percées de trous afin qu’on pût répandre sur les convives des fleurs ou des parfums. La principale salle était ronde et tournait continuellement sur elle-même, alternant jour et nuit comme l’univers » [2].

Après la mort de Néron, la Domus Aurea est dépouillée de son or, de ses marbres et pierres précieuses. Les empereurs Titus, puis Trajan, font édifier des thermes sur ses ruines, en réemployant matériaux, mosaïques et statues (par exemple le Laocoon), manière de montrer au peuple qu’ils se démarquaient des folies grandioses de Néron et qu’ils lui rendaient l’usage du site dans un bien public commun, les thermes. Le plan des thermes, dû à Apollodore de Damas, était innovant, se caractérisant par l’existence d'un grand espace vert dans une enceinte de portiques. A l’emplacement du lac de la Domus Aurea sera construit l’amphithéâtre Flavien (le Colisée) lequel tient son nom de la colossale statue de bronze que Néron avait fait ériger dans le vestibule de son palais et qu’Hadrien fit transporter devant le temple de Vénus et de Rome [3].

Sous le parc, agrémenté d’immenses pins parasols, il y a donc au moins deux couches archéologiques : celle correspondant aux thermes et, encore en dessous, celle de la Domus Aurea [4]. Au pied de la colline sont également visibles les ruines de la principale école de gladiateurs, le Ludus Magnus. La question posée aux conservateurs et aux responsables publics est de savoir ce qu’il faut sauver, les ruines de la Domus Aurea, des thermes ou le magnifique parc si caractéristique des paysages romains ? Mais la question se pose-t-elle toujours ? Le 30 mars 2010, une partie du plafond de la Domus Aurea s’est effondrée et le site a de nouveau été fermé « pour une durée indéterminée ». Les moyens du ministère de la Culture avaient été divisés par deux par le gouvernement Berlusconi car, comme chacun sait, la culture cela ne sert à rien. Depuis d’importants travaux ont heureusement été réalisés en s’efforçant tout à la fois de protéger les ruines dans le sous-sol tout en maintenant des jardins en surface en réalisant des travaux d’imperméabilisation [5]. Les découvertes se poursuivent encore puisqu’en 2019 a été mise à jour la salle dite « du sphinx ». Mais il reste encore beaucoup à faire tant en sous-sol qu’en surface !


[1] Sovrintendenza capitolina ai Beni Culturali. « Colle Opio ». En juin 2017 a été créé le Parc archéologique du Colisée qui englobe des monuments de compétence directe de l’État (Colisée, Domus Aurea, Forum Romain…), ou gérés par Rome-Capitale (Cirque Maxime, Forums Impériaux), ainsi qu’une partie du patrimoine religieux (Saints Cosme et Damiens, Saint-Bonaventure et Sainte-Anastasie du Palatin).

[2] Suétone. « Vie de Néron ». Cité par Wykipedia.

[3] Jean Gagé. « Le Colosse et la Fortune de Rome ». In « Mélanges d'archéologie et d'histoire », tome 45. 1928.

[4] Entrée libre, tous les jours, de l’aube à 21h00. Entrées : via Labicana, viale del Monte Oppio et via Mecenate.

[5] La Domus Aurea se visite en réalité virtuelle, le samedi et le dimanche en italien, anglais, espagnol et français.

Liste des promenades dans Rome et liste de la promenade Esquilino et Monti Nord

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