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Notes d'Itinérances
17 mars 2022

Emilie - Romagne (23/28). Le château de Torrechiara.

Forteresse défensive et résidence de loisirs

 

 

Le château de Torrechiara est situé dans la province de Parme, sur les premières collines des contreforts de la chaîne des Apennins. Le nom du château dérive du verbe « torchiare », presser ou écraser quelque chose dans un pressoir, ce qui renvoie aux cultures de cette partie de la plaine et des collines où étaient produits de l’huile au Moyen-âge et des vins aujourd'hui. C’est un imposant château-fort du XVe siècle perché sur une butte rocheuse, présentant à la fois des caractéristiques médiévales et Renaissance. Sa construction a commencé en 1448 sur les ruines d’une ancienne forteresse. Structure défensive puissante, le château fut néanmoins aussi conçu comme une élégante demeure pour le comte Pier Maria II de’ Rossi et sa bien-aimée, Bianca Pellegrini de Arluno, La massive fortification centrale se développe sur un plan rectangulaire, autour d’une cour d'honneur, avec quatre tours quadrangulaires à chacun des angles. Elle est entourée de deux autres murailles confortées de tours quadrangulaires et d’un double fossé. L’ensemble du château est revêtu de pierres à la base et de briques sur les sommets des murs et des tours. 

 

Après le décès de Pier Maria II de’ Rossi, en 1482, le château passe à la puissante famille des Sforza, duc de Milan. Au cours des querelles et guerres entre communes et États riverains, puis des prétentions de la royauté française sur le duché de Milan, le château connait plusieurs assauts et changements de propriétaires. La situation se pacifie dans la seconde moitié du XVIe siècle et le comte Sforza I Sforza di Santa Fiora accentue la fonction résidentielle de la forteresse en apportant des modifications au château : construction des deux loggias panoramiques, démolition d’une partie des murs de la forteresse, transformation des terrasses en vergers et jardins suspendus, enfin il commande au peintre Cesare Baglioni (1525 / 1615) et ses assistants la décoration des pièces intérieures.

 

Les salles du château sont somptueusement décorées de fresques, peintes dans les années 1580, représentant des scènes de la nature, des grotesques, et des scènes fantastiques ; le nom de chaque salle rappelle le thème principal de la décoration. Les peintures les plus nombreuses sont des grotesques [1] lesquels évoquent, sur les murs et sur fond blanc, de petits temples, des architectures imaginaires, des vases, des branches entrelacées avec des fruits, des enroulements de feuillages, des rubans, des bucranes, des sphinx, des oiseaux, des nymphes, des acrobates, des animaux fantastiques, des combats entre des guerriers et des personnages mythologiques… Dans ces salles, les plafonds voûtés sont peints de thèmes différents : un ovale contenant un aigle avec Jupiter sur un nuage s’apprêtant à lancer un éclair, un rectangle contenant un Cupidon portant des fleurs, un grand ovale avec en trompe l’œil une balustrade soutenue par des colonnes et, au centre, volant parmi les nuages, la Victoire, des architectures en trompe-l’œil encadrant huit grandes armoiries… Une salle, avec une voûte en berceau, est décorée d'une fresque en trompe-l'œil représentant une pergola.

 

Au premier étage, quatre salles présentent un tout autre registre thématique. Il s’agit de scènes de chasse et de pêche, en continuité avec la décoration du plafond, qui se déroulent, sur fond bleuté, parmi des collines décorées de ponts, de monuments antiques, de colonnes, de ruines de châteaux ou de temples romains, ou de massifs châteaux-forts perchés sur des reliefs et, en arrière-plan, des montagnes très hautes et très escarpées à l'aspect irréel. Le plafond de la salle de l’Aurore est décoré d’un soleil entouré d'un halo jaune-rose et de nuages concentriques roses, bleus et violets ; celui de la salle du midi est orné d'une fresque représentant un ciel bleu traversé de gros nuages blancs sur lesquels se détachent faucons, hérons et cormorans en vol ; celui de la salle des vêpres d’un soleil en clé de voûte, entouré concentriquement par toutes les nuances du jaune au violet foncé en passant par l'orange et le rouge ; celui de la salle du soir, enfin, avec un ciel bleu foncé, d'épais nuages blancs et de nombreux oiseaux en vol.

 

Si les peintures de grotesques correspondent à la mode qui s’est développée en Italie au début du XVIe siècle, les quatre salles de l’étage sont plus étonnantes, jouant sur des effets fantastiques, voire oniriques, dont je ne connais pas de correspondance sinon, au XIXe siècle, chez les Romantiques.

 


[1] Les grotesques sont des dessins inspirés des décorations fantastiques découvertes vers 1480 dans les ruines enterrées de la Domus Aurea de Néron.

 

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