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Notes d'Itinérances
14 avril 2023

Rome, étrange et curieuse (24/45). Rione Campitelli X (2) - Marc-Aurèle annonce-t-il la fin des temps ? - Piazza del Campidoglio

Marc Aurèle devenu Constantin - Un oracle bien indécis

 

 

En 1537, Paul III Farnese (1534 / 1549) confie à Michel-Ange (1475 / 1564), le soin de reconstruire le cœur de la Rome politique après le sac de la ville, dix ans plus tôt, par les mercenaires de Charles Quint. Michel-Ange dessine les plans d’un ensemble architectural nouveau : une longue rampe sur le flanc de la colline du Capitole conduit à une place, située 40 mètres plus haut, de forme trapézoïdale, fermée sur trois côtés par trois palais aux façades symétriques. La forme évasée de la place donne plus d’ampleur au palais Sénatorial qui la ferme. Le Bernin saura se souvenir de la leçon du maître en donnant une configuration semblable à la colonnade de Saint-Pierre.

 

Michel-Ange traite les façades des trois palais avec des pilastres qui embrassent les deux étages des édifices pour leur donner plus de solennité (ordre architectural dit colossal), innovation qui sera reprise par Palladio et les architectes de la Renaissance puis du baroque. 

 

« Ce fut Paul III (Farnèse) qui, vers l’an 1540, fit élever les deux édifices latéraux qui me semblent sans caractère, quoique de Michel-Ange. Il fallait en un tel lieu deux façades de temples antiques. Rien ne pouvait être trop majestueux ou trop sévère, et Michel-Ange semblait créé exprès pour une telle mission. Paul III renouvela la façade du palais du sénateur de Rome, qui occupe la pente du mont Capitolin, vers le forum » [1].

 

Au centre de la place, Michel-Ange installe sur un socle, qu’il taille dans une corniche du forum de Trajan, une statue équestre romaine en bronze, la seule qui n’ait pas été détruite au motif qu’elle représenterait l’empereur Constantin lequel prescrivit la tolérance religieuse des cultes, notamment du Christianisme. En réalité, il s’agit de Marc-Aurèle, mais bon, tout le monde peut se tromper (photo) ! La statue équestre était située, à l'origine, sur un des forums impériaux avec les statues d'autres empereurs. Elle aurait été fondue en 176 pour fêter le triomphe de l’empereur sur les peuples germaniques, ou en 180, peu de temps après sa mort. Au VIIIe siècle elle fut déplacée devant le Palais du Latran pour honorer Constantin, le premier empereur chrétien, puis une seconde fois, en 1538, au centre de la place du Capitole. 

 

A l’origine, la statue était dorée et il en reste quelques traces par-ci par-là. La légende prétend que le jour du Jugement dernier arrivera quand tout l’or aura disparu sur la statue ! C’est une indication précieuse qui nous permet de penser que nous n’attendrons pas trop longtemps car les traces de dorures sont désormais bien rares. Est-ce pour se donner un répit que la statue a été déplacée une nouvelle fois, pour la protéger de la pollution, en rejoignant une nouvelle salle d'exposition dans le musée, l'« Esedra Marco Aurelio » de l'architecte Carlo Aymonino. La salle a été construite dans le cadre du projet « Grand Capitole » ayant pour but de réaménager le complexe des musées du Capitole. Cette vaste salle très lumineuse abrite, outre la statue équestre de Marc Aurèle, les bronzes donnés au peuple romain par Sixte IV della Rovere, en 1471, lesquels constituèrent le premier musée au monde. Sur la place du Capitole, la statue d’origine est donc remplacée par une copie. Mais il existe une autre variante à la légende : à contrario, la statue se recouvre petit à petit d’or et, quand elle sera entièrement recouverte, Rome redeviendra maître du monde ! A juger par la faible ampleur des traces dorées, ce n’est manifestement pas demain la veille !

 

Michel-Ange avait également imaginé un pavement original dans un grand ovale qui occupe toute la surface de la place : une figure géométrique sur la base de dodécagones positionnés sur sept cercles concentriques, formant une fleur aux pétales ouverts avec, en son centre, une étoile rayonnant autour de la statue [2].

 

Nul n'avait encore imaginé pareil ensemble urbanistique, tout à la fois fermé sur lui-même, mais également ouvert sur la ville par cette rampe majestueuse.

 


[1] Stendhal. « Promenades dans Rome ». 1829.

[2] Le motif étoilé au sol n'a été réalisé qu'en 1940, à l'occasion des travaux de creusement de la galerie souterraine qui relie les trois palais de la place. Il est inspiré du dessin original mais pas identique à celui-ci. Le dessin en est représenté sur la pièce italienne de cinquante centimes d’euro.

 

Liste des promenades dans Rome  et liste des promenades dans Rome étrange et curieuse

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