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Notes d'Itinérances
14 avril 2024

Trastevere - Lungara et Janicule (10/20). Le Conservatorio Pio et Santa Maria delle sette Dolore.

Oeuvres pieuses au pied du Janicule

 

 

Aux n°41/45 de la Via Garibaldi, le bâtiment de la Vecchia Fabbrica del Tabacco (ancienne fabrique de tabac) a été construit pour accueillir une usine de transformation du tabac de la société de Giovanni Michilli et Giovanni Antonio Bonamici, à qui Benoît XIV Lambertini (1740 / 1758) avait accordé une licence de fabrication[1]. L'architecte Luigi Vanvitelli a collaboré à la conception et à la construction du bâtiment de trois niveaux, lequel était achevé et opérationnel en 1744. Les plants de tabac y étaient broyés par trois meules mises en mouvement au moyen de l'énergie hydraulique produite par une chute d’eau dans un tuyau de la fontaine de San Pietro in Montorio située sur la colline du Janicule ; l’eau s’écoulait ensuite dans le Tibre.

 

La manufacture de tabac ne vécut pas très longtemps puisqu’en 1775 le pape Pie VI Braschi (1775 / 1799) fonda dans ses locaux le Conservatorio Pio du Janicule. Le Pontife acheta d'autres bâtiments adjacents avec des potagers, et fit transformer les locaux du rez-de-chaussée de la manufacture pour les utiliser comme filature de laine. L’objectif de la création de cette œuvre pieuse était d'héberger et d'éduquer les filles pauvres de la ville, orphelines, ou se trouvant abandonnées et sans moyens de subvenir à leurs besoins[2]. Les revenus de la fabrique de laine devaient permettre de couvrir les frais d’hébergement des pensionnaires. C’était une tradition bien établie que d’ériger dans le quartier du Trastevere les organismes chargés des populations les plus misérables de la ville, infirmes, vieillards, malades mentaux, mendiants, prostituées, orphelins, c’était tout simplement un moyen de les écarter du centre-ville où on ne souhaitait pas les voir. En 1820, le Conservatoire fut encore agrandi avec la création d'une infirmerie et d'un jardin pour les orphelins. A partir de 1844, dans le cadre d’une réorganisation générale des œuvres pieuses à Rome, les bâtiments de la filature passèrent de main en main et, en 1880, le nouvel État italien racheta finalement les locaux. Ils servirent successivement de clinique chirurgicale, puis d’école pour les gardes de la ville, puis d’école de la garde royale et des carabiniers ; ils accueillent aujourd’hui un commandement régional des Carabiniers.

 

Avant le premier virage de la via Garibaldi, à gauche, au n°27, vous remarquerez la façade toute de brique de Santa Maria delle sette dolori de Francesco Borromini (photo). L’église était attachée à un monastère d’oblates[3] cloitrées qui avait pour finalité de dispenser une éducation aux filles de la noblesse désargentée. Le monastère fut un lieu de refuge pour une centaine de juifs de Rome durant l'occupation nazie. En 1951, les sœurs ouvrirent un refuge pour les orphelins du Trastevere. Faute de vocations, une partie des bâtiments accueille aujourd’hui un hôtel quatre étoiles (« Donna Camilla Savelli ») qui utilise la crypte, avec son escalier borrominien, comme cave à vin.

 

Avec très peu de moyens, des quarts de cercles plaqués en relief, Borromini anime la façade. L’accès à l'église s’effectue dans cette façade, par un vestibule pour lequel Borromini se serait inspiré de l’architecture de la Piazza d'Oro de la Villa d’Hadrien à Tivoli : d’un plan octogonal irrégulier, à la voute plane, soutenue par quatre arcs. La nef, rectangulaire, parallèle à la façade, aux angles arrondis et ponctuée de colonnes corinthienne de marbre rose, présente un transept légèrement saillant[4]. Les colonnes supportent un entablement, décoré de marbre vert, qui forme des arcs sur les petits côtés et les chapelles ; le plafond, assez plat, s’élève à partir du sommet de ces arcs. En 1646, faute de financements, Borromini a cessé sa participation et l’intérieur de l’église n’a été achevé qu’en 1665. La décoration de l’église, très colorée et très peu borrominienne, est due à la restauration de 1845.

 

 


[1] In RomaSegreta. « Via Garibaldi ».

Fabio Robotti. « La manifattura del tabacco nella Roma pontificia ». In « Panorama Numismatico ». 06/2016.

Pour Antonio Ceci « Il monopolio del tabacco in Italia Ascesa e declino di una industria di Stato » in « Historia et Ius » 2015, la première usine de tabac aurait été construite à Rome en 1774 par Pietro Giovanni Wendler ; la fabrique de tabac de la via Garibaldi a cessé ses activités à cette date.

[2] Alessandra Venerosi Pesciolini. « Conservatorio Pio al Gianicolo - Archivio storico - Inventario 1775-1873 ». 2015.

[3] Un oblat ou une oblate est un laïc qui « se donne » à un monastère qui l'accueille pour lui permettre de vivre certains aspects de la vie spirituelle monastique.

[4] Site Romanchurches. « Santa Maria delle sette dolori ».

 

 

Liste des promenades dans Rome. et liste des articles sur le Janicule

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