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Notes d'Itinérances
16 septembre 2013

Yémen - Aden Arabie (12/33). Savez-vous ce que c'est que qater ?

La cérémonie du qat - le salon à qat - départ pour Aden - Arrêt à Damt - La situation des juifs au Yémen

 

 

Nous sommes conviés à « qater » chez le secrétaire général de la préfecture dans le salon consacré à cet effet, le moufreidj,. Le moufreidj est la première pièce accessible du hall d’entrée. C’est une vaste salle, beaucoup plus longue que large, très largement éclairée, aux murs blancs et au sol couvert d’une épaisse moquette. Le long des côtés et au fond sont disposés des divans. L’assise en est séparée par des coussins qui permettent à chacun de s’accouder. Devant le divan sont disposées des tables basses.

 

La séance de qat est un rite de cohésion sociale, notamment autour de l’hôte qui invite et est un leader, familial, tribal, institutionnel ou professionnel. L’hôte du jour a contacté frères, cousins, amis, relations politiques ou professionnelles, la veille ou le matin pour offrir son moufreidj.

 

Après avoir pris son repas, chacun se rend à l’invitation avec son achat personnel de qat dans un sac en plastique. Ce sont une trentaine de personnes qui participent à la séance. Les invités, après s’être salués, s’installent confortablement. Le maître des lieux et ses invités sont installés au fond de la salle afin qu’ils puissent voir et être vus de toute la salle. Des bouteilles d’eau sont offertes à chacun des invités. Chacun commence alors à mastiquer ses feuilles de qat, en les emmagasinant progressivement dans la joue formant ainsi une chique qui déforme graduellement la joue et le visage. Au début de la réunion, chacun discute avec ses voisins, occasion de régler de nombreuses questions personnelles, familiales ou professionnelles. L’ambiance est détendue, joviale, chaleureuse. L’arrivée des amphétamines dans le sang produit un effet euphorisant deux heures environ après le début de la mastication. Il paraît alors que chacun plaisante et rit, à l’image des effets de l’alcool. Puis après deux heures, une sensation plus ou moins dépressive et de somnolence s'installe.

 

Devant atteindre Aden le soir même nous quittons la séance en cours.

 

En route, nous faisons une pause « five o clock » à Damt, petite ville dominée par un petit volcan qui est posé dans le paysage comme une grosse pustule. Un escalier métallique permet d'en atteindre le sommet pour y admirer les eaux vertes d'un lac volcanique. Tout autour du volcan, jaillissent plusieurs sources d'eau chaude.

 

Mais, plus que le volcan, c’est notre vessie qui nous préoccupe ! Bien sûr, la gargote du bord de route qui nous accueille ne possède pas de toilettes. Le tenancier n’en recherche pas moins une solution en nous offrant d’utiliser les toilettes du hammam voisin lequel est d’ailleurs fourni en eau chaude par le volcan. C’est une étrange plongée que nous effectuons alors dans un monde de demi obscurité, dans les vapeurs d’eau chaude, au milieu des hommes dénudés, une serviette autour des reins alors que, bien sûr, nous sommes habillés et chaussés ! Nous traversons la salle chaude, transpirant et suant, pour arriver aux toilettes d’une saleté peu commune, au sol couvert de déjections. Mais nous n’avons pas fait tout cela pour rien et il ne nous reste plus qu’à nous exécuter avant de retraverser le hammam, toujours habillé et en chaussures, dégoulinant et suant.

 

L’anecdote mériterait à peine d’être relatée, même si elle fut une expérience forte, si un hammam de Damt - celui-ci ? – n’avait été le théâtre d’un fait divers ayant des implications politiques. Le 20 mars 2001, le journal israélien Haaretz rapportait qu’au Yémen « Trois Juifs soupçonnés par les autorités d’avoir collaboré avec les services d’immigration d’Israël ont été assassinés ». L’un d’entre eux avait trouvé la mort dans un hammam de la ville de Damt. Pour les autorités yéménites, la victime aurait fait une chute. Pour la communauté juive du Yémen, il aurait été assassiné à cause de ses opinions religieuses. La victime était l’oncle du jeune Itia Yehiel Naari dont la photo avait été largement publiée dans le monde avec le slogan « Sauvez les juifs du Yémen » lequel, devenu le symbole des Juifs du Yémen, était arrivé en Israël quelques semaines plus tôt.

 

La situation de la poignée de juifs - un millier de personnes environ - demeurant au Yémen n’est certainement pas enviable compte-tenu du développement de bandes armées islamistes dans certaines parties du pays. Peu de temps après notre voyage, une soixantaine de Juifs d'Al-Haid, un quartier de la ville de Salem, dans le district de Saada ont été chassés de leur village par des islamistes armés et ont dû trouver refuge à Sanaa.

 

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