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Notes d'Itinérances
9 mai 2021

Les obélisques de Rome (20/28). 1839 – Parc du palais du Quirinal (n°17).

Rione Trevi - Au centre d'un labyrinthe

 

 

[1]        Voilà bien l’obélisque le plus discret de Rome ! Il ne porte pas de nom et il est ignoré des documents listant les différents obélisques de la ville bien qu’installé dans un site prestigieux, les jardins du palais du Quirinal devenu palais royal et enfin celui de la présidence de la République italienne. Mais que fait-il là cet obélisque ? Quand et comment y a t-il été installé ? Cela nécessite un détour historique… 

 

Le vignoble de la colline du Quirinal était un des lieux les plus renommés de la ville pour son emplacement pittoresque et venteux. Il appartenait à la famille Carafa qui le louait aux puissants de l’époque. A partir de 1545, le pape Paul III Farnèse (1534 / 1549) y réside et paye son loyer sous forme d’aménagements du jardin ! Le locataire suivant est le cardinal Hyppolite d’Este, fils du duc de Ferrare et de Lucrece Borgia, qui ordonne des travaux parallèlement à ceux de la création des fabuleux jardins de la Villa d’Este à Tivoli. Les jardins, organisés à la mode de la Renaissance italienne, en « quadri » (carrés), sont enrichis de plantes rares, de nouvelles fontaines, de sculptures, dont plusieurs proviennent de la villa d’Hadrien à Tivoli.

 

En 1574, Grégoire XIII Boncompagni (1572 / 1585) acquiert la propriété et décide d’y construire un palais, en conservant le jardin laissé par Hyppolite d'Este. Son successeur, Sixtus V Peretti (1585 / 1590) fait construire un aqueduc, celui de l’Acqua Felice, dont une dérivation permet d’alimenter le quartier et les jardins du Quirinal. Sous Clément VIII Aldobrandini (1592 / 1605), l’architecte et fontainier Giovanni Fontana réorganise les systèmes d’alimentation en eau, multiplie les fontaines et permet la création d’un orgue hydraulique, fabriqué par Luca Blasi, la fontaine de l’Orgue, célèbre par son jeu d’eau musical et la richesse de ses sculptures. Sous Paul V Borghese (1605 / 1621), le Quirinal devient définitivement la résidence d’été des souverains pontifes. Urbain VIII Barberini (1623 / 1644) rachète de nombreuses propriétés bordant le jardin du Quirinal ce qui permet une extension importante du jardin. Les nouvelles limites du jardin sont protégées de remparts et le palais transformé en citadelle fortifiée. Benoit XIV Lambertini (1740 / 1758) fait construire, par son architecte Ferdinando Fuga, le « Caffehaus » (Coffee-House) situé sur le bord de la colline et surplombant la ville de Rome, où le souverain pontife accueille, dans un lieu intime, les visiteurs pour des rencontres informelles tout en jouissant d’une vue sur la ville. 

 

Au début du XIXe siècle, sous l’occupation de la République française puis de l’Empire, le jardin évolue bien évidemment « à la française » avec la création d’espaces ouverts, plus vastes, des platebandes aux bordures basses de buis au lieu des haies élevées qui créaient des carrés isolés les uns des autres lesquels caractérisaient le jardin du Quirinale et fragmentaient la vision. Une zone trapézoïdale est organisée en face de la Coffee-House pour mettre en valeur la façade du bâtiment et la vue sur Rome. Une longue place rectangulaire, nord-sud, coupe le jardin en deux.

 

Après la tourmente napoléonienne, les papes réintègrent leur palais. Grégoire XVI Cappellari (1831 / 1846) décide d’une réorganisation paysagère partielle des jardins, selon la mode de l’époque, à « l’anglaise ». Ce nouveau jardin [2] est parcouru par des sentiers courbes qui conduisent le visiteur à des plans d’eau, des fontaines, des buttes, des pavillons « exotiques », une pagode chinoise, une cabane campagnarde, un chalet suisse…. et un grand labyrinthe elliptique de buis (1839), orné en son centre d’un obélisque, le tout planté sous les fenêtres du palais [3]

 

L’obélisque du labyrinthe est modeste par sa taille mais aussi par ses origines : il n’est ni égyptien, ni romain, mais moderne, sans fioritures. Il est installé discrètement dans les jardins privés du Quirinal. Pas question d’en faire un signe public magistral comme à la villa Borghese, ni de faire une inauguration avec tambour et trompette comme à la villa Torlonia, ni d’inauguration grandiloquence à la mode des cérémonies fascistes comme au Foro Italico ! C’est simplement une pierre taillée qui signale le centre du labyrinthe qu’il faut atteindre. Mais, d’évidence, dans une ville aussi riche en obélisques, érigés par de nombreux papes, ce signal ne pouvait prendre que la forme d’un obélisque !

 


[1] Photo du site du Secrétariat général de la présidence de la République.

[2] Le palais et les jardins du Quirinal sont désormais ouverts à la visite

[3] Segretariato generale della Presidenza della Repubblica. « Il giardino del Quirinale ». Sd.

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur les obélisques de Rome

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