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Notes d'Itinérances
7 juillet 2019

Monti, entre Cavour et Nazionale, la Suburra (5/11). Un quartier turbulent.

Mur du temple de Mars-Vengeur - Palais del Grillo - Le marquis du Grillon

 

 

La via Madonna dei Monti descend vers le forum d’Auguste. La via Tor de Conti et la saluta del Grillo permettent de remonter vers le haut de la Suburra.

 

Le côté gauche de la rue est alors occupé par une puissante muraille de pierres. Entrecoupée de deux lits de travertins, elle est composée de très grosses pierres, reliées par des joints de chêne et non par un ciment. L’objectif de cette construction massive était de protéger le Temple de Mars-Vengeur, situé sur le forum, des risques d’incendie pouvant provenir du populeux quartier de la Suburra dans lequel les incendies étaient fréquents. 

 

« Oh ! Vous frapperez vos poitrines, vous vous roulerez dans la poussière et vous déchirerez vos manteaux ! N’importe ! il faudra s’en aller tourner la meule dans Suburre et faire la vendange sur les collines du Latium » [1].

 

Dans la Suburra on trouvait – dit-on - les bordels les plus inquiétants et les tavernes les plus louches. Jules César y naquit et, selon la tradition, Néron y errait déguisé pour connaître les opinions du peuple et Messaline venait y chercher ses amants.

 

Dans la via Tor di Conti, regardant de nouveau en l’air (en faisant attention où l’on marche  compte-tenu des pavés très inégaux de la route qui, pour une raison non élucidée ce matin-là, sont couverts de mégots !), on remarque une tour de briques surmontée d’une balustrade de travertin. Elle a été édifiée en 1223 par la famille Carbone. Elle devint ensuite la propriété de la famille Conti, et enfin acquise, en 1675, par la famille de Grillis. Ils firent un palais de la forteresse, ajoutant un couronnement en travertin à la tour de brique, sur lequel est gravé, en lettres dorées « EX MARCHIONE DE GRILLIS ». Les fenêtres du palais XVIIIe présentent des décorations avec des volutes, des lions, des coquilles. Un grandiose portail baroque, surmonté d'une coquille, est situé sur la place. 

 

Dans la mémoire populaire, le palais est lié au fantasque « Marquis du Grillon », sans que l’on sache si le personnage a véritablement existé. La mémoire populaire veut que ce marquis s’amusât au dépend d’autrui en faisant toutes sortes de mauvais tours et de farces, le plus souvent contre les puissants, les nobles et les ecclésiastiques, mais aussi très fréquemment contre les Juifs pour lesquels il avait une antipathie particulièrement forte. 

 

La légende a même donné lieu à un film [2] où le marquis du Grillon, duc de Bracciano, est camérier secret du pape Pie VII Chiaramonti (1800 / 1823), dans la Rome des années 1800. Le noble passe ses journées à faire d’insolentes plaisanteries souvent impitoyables, sans ménager personne, pas même le pape. Ayant rencontré un pauvre charbonnier lui ressemblant étrangement, un dénommé Gasperini, il l’introduit dans sa famille, s’amuse des troubles que cela engendre et décide de profiter de la situation en laissant son sosie prendre sa place. Le subterfuge doit lui permettre de s’échapper à Paris avec une actrice. Après la défaite de Napoléon, il revient à Rome où il constate que son sosie a été condamné à mort par le pape pour désertion. Comme il s’agit d’une comédie italienne, tout se termine pour le mieux. 

 

De 1965 à 1987, le palais del Grillo a abrité l’atelier du peintre Renato Guttuso (Bagheria 1911 / Rome 1987) aux thèmes souvent sociétaux. C’est notamment là qu’il a peint, à partir de 1966, le cycle de tableaux autobiographiques constituant une interprétation personnelle des événements historiques et culturels qui se sont produits en Italie dans les années de la Seconde Guerre mondiale et de la Résistance, ou encore, par exemple, « le Caffè Greco », aujourd'hui dans la collection Ludwig à Cologne.

 

Après la Torre del Grillo, la via Tor di Conti débouche sur le largo Magnanapoli, ou plutôt un vaste carrefour entre la via Nazionale qui fonce à droite sur la place de la République, la via XXIV Maggio qui monte en face ver le Quirinal et la via IV Novembre laquelle descend à gauche sur la place de Venise. La circulation est intense, bruyante, et donne l’impression d’être situé dans les tribunes de la chicane Dunlop du circuit automobile des 24 heures du Mans !

 


[1] Gustave Flaubert. « Salammbô ». 1862.

[2] Mario Monicelli. Film « Le marquis s’amuse ». 1982. Avec Alberto Sordi.

 

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