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Notes d'Itinérances
14 octobre 2013

En pays maya - Yucatan et Hautes Terres (7/24). Le couvent d’Izamal.

Le couvent franciscain de Saint-Antoine-de-Padoue - Les activités "évangélisatrices" de Diego de Landa Calderon

 

 

« Il existe, dans cette ville d'Ytzamal, cinq pyramides sacrées ou collines très élevées, entièrement édifiées de pierre sèche, avec leurs soutiens et contreforts, au moyen desquels la pierre se dresse jusqu'en haut ; mais on ne voit aucun édifice en son entier aujourd'hui (...) On y venait de toutes parts en pèlerinage ; c'est pourquoi ils avaient fait aux quatre vents quatre routes ou chaussées qui s'étendaient à toutes les extrémités du pays, allant jusqu'à la terre de Tabasco, de Guatémala et de Chiapa, de quoi l'on voit encore aujourd'hui des restes et des vestiges en beaucoup d'endroits » [1].

 

Le site était dédié à Itzamná, patron des sciences et inventeur de l’écriture, et Kinich-Kakmó, le dieu soleil. Ses premiers bâtiments remontent au IIe siècle, mais son époque de splendeur se situe entre 800 et 1 000. La cité a été désertée à la période postclassique et, lors de la Conquête espagnole, sa population avait beaucoup diminué. De l’architecture préhispanique, il demeure la pyramide d’Itzamná et celle en l’honneur du dieu soleil restaurée pendant les années 90. Les fouilles ont mis au jour quelques 80 vestiges mayas importants. Le couvent franciscain de Saint-Antoine-de-Padoue a été construit sur une haute plateforme maya appelée Papolchach (maison des chefs), à partir de 1553, sous l’impulsion de Diego de Landa Calderón (1524 / 1579). Si les principaux bâtiments étaient terminés dès 1561, les arcades qui entourent l'atrium, les rampes et l’arc de triomphe surmontant l’entrée ont été ajoutés au XVIIe siècle formant un ensemble remarquable. Evidemment, de nombreuses pierres de la cité précolombienne furent réutilisées pour construire l’église et le monastère !

 

Après en avoir chassé les démons et transformé ces lieux d’idolâtrie en lieu sanctifié, Diego de Landa décida de frapper un grand coup en allant chercher, en 1558, une statue de la Vierge auprès d’un sculpteur renommé, le frère Juan de Aguirre du Guatemala. Cette statue fut immédiatement l’occasion de nombreux miracles : lors de son transfert le convoi dut subir de nombreuses pluies, mais jamais sur la caisse de la statue, ni sur les indiens qui la portaient, ni même dans un cercle de quelques pas autour de l’endroit où ils se trouvaient ! Les miracles se succédèrent et la statue est toujours l’objet d’une grande vénération. Diego de Landa Calderón était un personnage sulfureux par son zèle missionnaire ! En juin 1562 un autel clandestin est découvert dans la petite ville de Maní, non loin de Chichén Itzá, comprenant plus de 5 000 objets sacrés mayas dont des centaines de manuscrits. Diego de Landa prend d’assaut la ville et crée un Tribunal d’Inquisition.

 

« Ils firent deux autodafés publics avec tout leur accompagnement de bannières, de processions, etc., au cours desquels ils imposèrent un grand nombre de san-benitos [2] aux indiens qui venaient d’être baptisés ; ils les fouettèrent tous, les tondirent et les condamnèrent à trois, six ou dix ans de service et d’esclavage ; ils retirèrent les ossements des sépulcres, apportèrent vingt statues de leur dieu et les brûlèrent avec les os ; cela sans avoir procédé à des enquêtes ni réuni d’autres preuves que les dires des indiens torturés, lesquels étaient entièrement faux et inventés, comme j’ai pu le vérifier moi-même. Ils tenaient prisonniers plus de cent chefs indiens dans le monastère de la ville et continuaient à en arrêter pour faire un autodafé et les brûler tous, acte illégal et tout à fait disproportionné. » [3]

 

Suite à son comportement Diego de Landa dû retourner en Espagne, en 1563, pour être jugé. En s’appuyant sur des décrets papaux qui autorisaient les Provinciaux d’Amérique à mettre en place des procédés d’Inquisition, Diego de Landa fut finalement absous et nommé évêque de Merida !

 

Mais il se produit encore des miracles à Izamal ! Le responsable chargé de la distribution des terres, accusé de corruption par la population, mais jamais inquiété par les autorités nationales, fut retrouvé mort, en 1975, enseveli sous un tas de pierre dans le parc de la ville. Les enquêteurs ne découvrirent jamais ce qui avait pu se passer, sauf à imaginer qu’il s’était enseveli tout seul ! Je ne suis pas sûr cependant que Notre-Dame d’Izamal y soit pour quelque chose…

 


[1] Bernardo de Lizana. « Historia de Yucatán, Devocionario de Nuestra Señora de Izamal y Conquista Espiritual ». 1633.

[2] San-benitos : casaque de couleur jaune, que l’Inquisition faisait revêtir à ceux qu’elle avait condamnés.

[3] Francisco de Toral, évêque du Yucatan « Lettre à Philippe II, depuis Mérida ». 01/03/1563.

 

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