Sallustiano - Un quartier d'administrations (7/11). La Villa Bonaparte et l’ambassade de France « près le Saint-Siège ».
La résidence de Pauline Bonaparte – Une représentation non auprès d’un Etat mais d’une entité religieuse !
Entourée d’un haut mur, il est impossible d’apercevoir la villa Bonaparte qui accueille l’ambassade de France près le Saint-Siège. La villa fut construite en 1750 pour le cardinal Silvio Valenti Gonzaga, secrétaire d’État du pape Benoît XIV Lambertini (1740 / 1758) dans un quartier qui alors composé de jardins et de vergers et proche du palais papal du Quirinal. Le cardinal, mathématicien et homme de culture, l’a fit décorer d’objets d’art d’Extrême-Orient, de papiers décorés de Canton, de sa collection de peintures, et d’une table mécanique qui montait les plats du sous-sol dans la salle à manger [1].
Après la chute de l’Empire, une partie de la famille Bonaparte, « Madame mère », le cardinal Fesch, oncle de Napoléon, Pauline et certains de ses frères, s’installent à Rome sous la protection du pape Pie VII Chiaramonti (1800 / 1823), pas rancunier vis-à-vis des Bonaparte malgré l’annexion des États-Pontificaux, son enlèvement et sa captivité à Fontainebleau ! Après avoir suivi l’Empereur déchu à l’Île d’Elbe, Pauline, épouse du Prince Camille Borghese en 1803 et princesse romaine, rejoint Rome en 1815 et acquiert la villa (photo). Elle entreprend d’importants travaux avec la création d’une série de salons au premier étage, de décors égyptiens mais aussi de commodités auxquelles Pauline était très attachée (salle de bain). La villa s’appelle alors villa « Paolina » [2] parce que madame mère pensait qu’elle était trop modeste pour la famille de l’empereur Napoléon ! À la mort de Pauline en 1825, la villa passe à ses neveux et leurs descendants jusqu’en 1906 date à laquelle elle est vendue au gouvernement prussien qui y installe sa légation près le Saint-Siège en 1908, puis l’ambassade d’Allemagne entre 1920 et 1944. En 1945, les biens du Reich sont confisqués par les Alliés et la France en fait l’acquisition pour y installer sa représentation « près le Saint-Siège » en 1950. La Villa, a été restaurée en 2018 et se visite [3] (grand salon, chambre égyptienne illustrée des campagnes militaires de Bonaparte en Égypte, chapelle du XVIlle siècle, salle à manger, pergola).
La composition du jardin a changé à plusieurs reprises. Jardin à l’italienne au XVIIIe siècle, en carrés symétriques, séparés par des allées et décorés de buissons bas, agrémentés aux coins de vases fleuris, il est devenu jardin à l’anglaise au XIXe avec pelouse centrale et allées latérales plantées de feuillus avec des bosquets. En 1835, le jardin comprend une orangeraie située le long du mur Aurélien [4]. En référence à cette orangeraie célèbre de la villa Paolina, la via XX settembre qui longe la villa a été plantée d’orangers.
Mais pourquoi « près le Saint-Siège » et non pas auprès de l’État du Vatican ? Le Saint-Siège et le Vatican sont deux entités distinctes. Le Saint-Siège est une entité spirituelle, liée à la personne du Pape, chef spirituel et temporel, quand l'État du Vatican est une entité géographique, juridique et administrative. C’est avec le Saint-Siège, et non l'État du Vatican, que les différents États du monde entretiennent des relations diplomatiques [5] ! Entre 1870 et 1929 (date des Accords du Latran), le Saint-Siège était reconnu comme sujet de droit international alors même que l’État du Vatican n’existait pas. Situation pour le moins curieuse dans laquelle c’est une entité spirituelle qui est reconnue comme sujet de droit international et est membre d'organisations internationales ! C’est évidemment la seule religion au monde qui se prévaut d’un tel statut. Les relations de la France avec le Saint-Siège ne sont d’ailleurs pas toujours faciles. De mars 2015 à mai 2016, la France n’avait plus d’ambassadeur près le Saint-Siège faute d’agrément donné par celui-ci au candidat proposé par le gouvernement français lequel avait avoué son homosexualité ! En avril 2016, la France a proposé un nouveau candidat, bien sous tous rapports, catholique, marié, père et grand-père… immédiatement accepté par le Saint-Siège. Faut-il faire l’hypothèse qu’à la veille des scrutins de la présidentielle et des législatives, le gouvernement et le président socialistes n’avaient pas voulu s’aliéner les votes des catholiques ? Ce serait une bien petite manœuvre mais qui ne surprendrait guère !
[1] Voir le site de l’ambassade de France près le Saint-Siège.
StoriaVoce. « La villa Bonaparte, entre histoire, art et diplomatie ». 25/02/2021.
[2] Nom qu’elle conserve pour les Italiens !
[3] Voir le site de l’ambassade de France près le Saint-Siège.
[4] Peinture d’Alessandro Castelli. « Viale dell'Aranciera a Villa Paolina ». 1835. Musée Napoléon.
[5] Seuls 14 États n'en ont pas, l’Afghanistan, l’Arabie saoudite, le Bhoutan, le Brunei, la Chine, les Comores, la Corée, le Laos, les Maldives, le Myanmar (Birmanie), Oman, la Somalie, Tuvalu et le Viêt Nam.
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