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Notes d'Itinérances
15 octobre 2023

Pigna - Entre les places de Venise et de Minerve (4/23). San Marco Evangelista al Campidoglio.

L'église des Vénitiens de Rome - Une Madama Lucrezia bien discrète

 

 

En 336, le pape Marc fit construire une première église consacrée à son saint patron, Marc [1], l'un des quatre évangélistes (avec Matthieu, Luc et Jean). Après une restauration en 792 par le pape Adrien Ier, l'église fut reconstruite une seconde fois par le pape Grégoire IV en 833. En 1465-70, lorsque le pape Paul II Barbo (1464 / 1471) consacra l’église aux Vénitiens résidant à Rome, la façade de l'église fut modifiée selon les canons esthétiques de la Renaissance avec l’érection d’un portique et d’une loggia. Entre 1740 et 1750, l’église a été restaurée par Filippo Barigioni qui en a modifié la physionomie intérieure avec l’adjonction de décorations baroques (fresques, stucs et colonnes de jaspe rouge devant les piliers des arcades). 

 

La façade de l'église comprend une loggia pour les bénédictions, similaire à celle de Saint-Pierre, et généralement attribuée à Leon Battista Alberti. Le portique compte trois arches encadrées par des colonnes semi-engagées de style ionique. La loggia répète la structure de trois arches séparées par des pilastres de style corinthien. La loge fut construite avec des marbres du Colisée et du teatro di Marcello. L'intérieur de l’église [2], d’aspect baroque, maintient certains éléments d'époques différentes en témoignage de l'histoire de la basilique. Le niveau du sol du IXe siècle a été conservé et il est situé beaucoup plus bas que le sol actuel imposant la descente d’un escalier pour se rendre dans la nef.

 

« Elle est divisée en trois nefs séparées par vingt colonnes de marbre de Sicile. Si l’on est disposé à sentir la peinture, on peut chercher ici quelques ouvrages de Pierre Pérugin, de Charles Maratte, de Ciro Ferri » [3].

 

Si l’on trouve bien le tableau de « L'Adoration des Mages » de Carlo Maratta dans la troisième chapelle à droite, la fresque de « Saint Nicolas de Bari » de Ciro Ferri dans la troisième chapelle à gauche, pas de trace du Pérugin ! A remarquer, à droite du sanctuaire, le monument funèbre de Leonardo Pesaro par Antonio Canova (1796) en style néoclassique. On visite aujourd’hui l’église plutôt pour sa très belle mosaïque de l'abside qui date du IXe siècle ; elle représente le pape Grégoire IV (avec l'auréole carrée des vivants) qui offre un modèle de la basilique au Christ, en présence de saint Marc l'évangéliste, du pape Marc et d'autres saints (photo). Le plafond en bois, à caissons, recèle les emblèmes du pape Paul II Barbo ; il est l'unique plafond plat du XVe siècle qui ait été préservé à Rome avec celui de Santa Maria Maggiore.

 

En sortant, à droite, contre le mur du palais de Venise, la statue de Madama Lucrezia est une des statues parlantes de Rome. Placée sur un socle, il s'agit d'un buste romain de la déesse Isis qui avait son temple non loin. Il est dénommé Lucrezia car il aurait été donné en cadeau à Lucrezia D'Alagno, maîtresse du roi de Naples Alphonse V. Le buste a été déplacé sur le parvis de l’église San Marco, en 1500, par le cardinal Lorenzo Cybo. Chaque premier mai, pour la fête du printemps, le buste était décoré, de colliers d’oignons, de carottes, d’ails et de piments pour la « danse des pauvres » qui entrainait les jeunes hommes, mais aussi les handicapés, bossus, estropiés et vieillards. Avant chaque danse, les couples devaient s'incliner devant Madame Lucrezia et retirer leurs chapeaux. Le buste a ensuite été relégué et oublié dans ce coin où Madama Lucrezia doit bien regretter les fêtes d’antan.

 

Sur la placette devant l’église se trouve la fontaine de la Pigna (pomme de pin), une des fontaines commandées par la ville, en 1927, à Pietro Lombardi pour illustrer divers lieux de Rome [4]. La pomme de pin renvoie au nom du quartier (Rione Pigna). Constituée d'une tige simple, au centre d'un petit bassin, sur laquelle deux corolles de tulipes stylisées soutiennent une pomme de pin. L'eau sort de deux becs latéraux et s'accumule dans des cuvettes au sol protégées par quatre colonnes. 

 

 


[1] Saint Marc est le saint patron de la ville de Venise.

[2] Site Romanchurches. « San Marco ».

[3] Stendhal. « Promenades dans Rome ». 1829. 

[4] Sovrintendenza Capitolinia ai Beni culturali. « La fontana della pigna ». Pietro Lombardi devait réaliser plusieurs fontaines : delle Arti (Via Margutta), dei Libri (Via degli Staderari), Fontana delle Tiare (Passetto)...

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