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Notes d'Itinérances
26 avril 2023

Rome, étrange et curieuse (30/45). Rione Trastevere XIII (2) – Les Madonelles miraculeuses - Piazza della Scala, 23.

Des Madonnes protectrices - Parfois à l'origine de miracles !

 

 

En vous promenant dans Rome, vous rencontrerez nombre de madonnine (madonelles). Une madonelle est un petit oratoire, généralement placé en hauteur sur la façade d’un immeuble. Il peut prendre la forme d’une plaque, d’une sculpture, d’une mosaïque, d’une statue, d’une terre cuite ou d’une toile peinte. La madonelle représente le plus souvent une madone, d’où son nom, même s’il existe de rares madonelles représentant le Christ ou un saint ! Elles sont souvent situées dans un renfoncement ou protégées par un cadre ou un petit auvent et accompagnées d’une veilleuse. A la Renaissance et après la Contre-Réforme, ces madonelles se sont répandues dans la ville où elles étaient alors plus de 1400. Dispersées dans la Rome intra-muros, Il en existerait encore 637, datant généralement de la période du XVIIe au XIXe siècle. Ces madonelles poursuivent la tradition antique des autels élevés aux dieux Lares (gardiens et protecteurs du foyer) et Pénates (esprits des ancêtres et protecteurs de la famille) qui veillaient sur la destinée de la famille et sur la maison.

 

Quelques-unes de ces madonelles romaines ont connu un destin extraordinaire en étant à l’origine de miracles, une quarantaine, ce qui n’est pas rien. Vingt-six madones se seraient animées en 1796 [1] ! Plus d'une douzaine de madonelles sont à l’origine de miracles divers, en ayant participé à la guérison d’un malade (Madonna dell'OrtoMadonna della Scala, Madonna di strada Cupaou en arrêtant une épidémie de peste (Madonna Salus Populi Romani). Quelques-unes ont sauvé des personnes, un bébé tombé dans le Tibre (Madonna dei Miracolii) ou un jeune homme injustement condamné à mort (Madonna delle Grazie), d’autres ont pleuré ou saigné après avoir reçu un caillou lancé par un joueur en colère (Madonna della Pace, Madonna Vallicelliana, Madonna di Grazia e di Misericordia) ou par des Juifs (Madonna dei Cerchi) ou pour avoir assisté à un meurtre (Madonna del Pianto). La Madonna della Lanterna a conservé sa lanterne allumée alors que celle-ci était submergée par les eaux du Tibre en crue, la Madonna del Sole répandait une lumière intense et la Madonna dei Monti a supplié les ouvriers qui détruisaient un mur « de ne pas blesser l’enfant ». Ces madonelles miraculeuses ont ensuite été accueillies dans une église voisine mais le plus souvent dans une construction nouvelle [2] comme à Santa Maria della Scala (Sainte-Marie-de-l’Escalier) dans le Trastevere, érigée en 1593 sur un projet de Francesco da Volterra, et qui abrite une madonelle miraculeuse (photo). L’image, posée sur une marche de l’escalier d’une maison du Trastevere abritant un enfant malade, aurait obtenu la guérison de celui-ci en 1579.

 

Curieusement ces madonelles miraculeuses datent majoritairement du XVIe siècle jusqu’à la moitié du XVIIe siècle [3]. Il semble qu’il faille ensuite attendre la dernière explosion du nombre des madonelles animées en 1796, celle-ci étant généralement attribuée à la très grande préoccupation de la Madone (ou des Catholiques !) pour la ville-sainte et les États-pontificaux suite à l’invasion d’une partie des États de l’Église par la toute nouvelle République française. Mais les XVIe et XVIIe siècles avaient aussi été assez agités pour l’église catholique romaine avec notamment l’expansion de la Réforme protestante et la remise en cause de dogmes fondamentaux [4] ! Remise en cause de dogmes et multiplication des miracles peuvent-ils être indépendants ?

 


[1] Toutes n’étaient pas des madonelles des rues, quelques-unes étaient des images dans des églises

[2] J’ai identifié 16 madonelles romaines miraculeuses hors les 26 de 1796 : 593, Madonna Salus Populi Romani / Santa Maria Maggiore ; vers 750, Madonna Advocata / Palazzo Barberini ; 1325, Madonna dei Miracoli / Santa Maria dei Miracoli ; 1470, Madonna delle Grazie / Santa Maria della Consolazione ; 1480, Madonna della Pace / Santa Maria della Pace ; 1488, Madonna dell'Orto / Santa Maria dell'Orto ; 1535, Madonna Vallicelliana / Chiesa Nuova ; 1546, Madonna del Pianto / Santa Maria del Pianto ; 1560, Santa Maria del Sole / localisation actuelle inconnue ; 1577, Madonna della Lanterna / San Giovanni Calabita ; 1579, Madonna dei Monti / Santa Maria ai Monti ; 1592, Madonna della Scala / Santa Maria della Scala ; 1624, Madonna di strada Cupa / Santa Maria in Trastevere ; 1648, Madonna di Grazia e di Misericordia / San Giovanni Battista dei Fiorentini ; XVIIe siècle, Madonna dei Cerchi / localisation actuelle inconnue ; 1656, Madonna Romanae Portus Securitatis / Santa Maria in Portico in Campitelli

[3] L-J Guenebault dans le « Dictionnaire iconographique des figures, légendes et actes des saints » (1850) précise qu’il existerait à Rome 120 représentations de la Vierge presque toutes couronnées et donc miraculeuses !

[4] 1517, affichage des thèses de Luther ; 1531, guerre de religion dans le Saint-Empire ; 1534, création de l’église anglicane ; 1555, à Augsbourg, partage du Saint-Empire entre Catholiques et Protestants ; 1592, procès de Giordano Bruno ; 1616, censure des travaux de Galilée.

 

Liste des promenades dans Rome  et liste des promenades dans Rome étrange et curieuse

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