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Notes d'Itinérances
16 janvier 2015

Entre Toscane du Sud et Ombrie (6/20). Pienza - Une ville nouvelle issue de la volonté d’un pape.

La "Perle de la Renaissance" - Une vision urbanistique nouvelle

 

 

Pienza, située à quelques kilomètres de Montepulciano, est gratifiée du titre de « Perle de la Renaissance » ! Située aussi au sommet d’une colline et entourée de remparts, elle est considérée comme le premier exemple de « ville nouvelle » : une ville créée de toute pièce, sur la base d’un plan général d’urbanisme. C’est ici, à Corsignano, un petit bourg rural, qu’est né Elea Silvio Piccolomini qui, devenu Pape (Pie II, 1458 / 1464), décida de le transformer radicalement. Comme quoi les Houphouët-Boigny avec Yamoussoukro et les Omar Bongo avec Franceville ont eu de respectables prédécesseurs !

 

Pie II confie le chantier à Bernardo Rossellino (1409 / 1464), assistant de Leon Battista Alberti pour l’érection du palais Rucellai de Florence (1446 / 1451). Il lui permet ainsi d’appliquer, pour la première fois, les principes architecturaux et urbanistiques issus de la Renaissance à la création d’une ville modèle dans une vision urbanistique homogène et rationnelle : rues droites, se coupant à angle droit, façades d’égales hauteurs, place centrale où sont disposés les bâtiments majeurs : la cathédrale tout d’abord, au milieu, et, de part et d’autre, le palais épiscopal et le palais Piccolomini. En face de la cathédrale, il construit le palais communal. Les éléments principaux de la vie sociale, politique et religieuse sont ainsi posés à l’image des forums antiques.

 

La cathédrale a été construite de 1459 à 1462. La façade est divisée en trois parties, correspondant aux trois nefs intérieures, séparées de pilastres colossaux, décorés de deux étages de colonnes, à la manière d’un arc de triomphe. L’ensemble, couronné d’un fronton triangulaire aux pentes assez affirmées, fait penser à l’église San Andrea de Mantoue, une œuvre d’Alberti. L'intérieur est encore marqué par le style gothique avec ses trois nefs séparées de piliers cruciformes revêtus de demi-colonnes et ses cinq chapelles absidiales éclairées de larges verrières en arc brisées et décorées de colonnettes lancéolées. Toutefois, la Renaissance s’affirme dans les hauts sommiers des piliers situés au-dessus des chapiteaux et les arcs en plein cintre de la nef. Cette cathédrale possède une particularité : aux équinoxes de printemps et d'automne, l'ombre de l’édifice s'inscrit exactement dans les neuf carrés du pavement de la place !

 

Le Palais Piccolomini, réalisé par Bernardo Rossellino, s’inspire du Palais Rucellai. Mais la façade arrière du palais, contrairement aux palais florentins clos sur eux même, est largement ouverte sur le jardin et les paysages doux et sensuels du Val d’Orcia, avec trois étages de loggias. Malheureusement, le projet urbanistique de cette ville nouvelle fut interrompu avec la mort de Pie II, puis de Rossellino, et Pienza se limita à cette place et à quelques palais de la rue principale construits par les familiers du Pape et quelques-uns de ses archevêques.

 

Cette vision urbanistique nouvelle est très présente dans les tableaux de la Renaissance qui situent des scènes de la vie du Christ, ou des martyrs chrétiens, dans des villes « idéales » avec des rues larges, se coupant à angles droits, des places monumentales et de nombreux palais « à l’antique ». Elle est également présente au Teatro olimpico de Vicenze d’Andréa Palladio (1580). Si la scène est fermée par un mur comme dans les théâtres antiques, celui-ci est percé de trois portes, d’où débouchent, venant de derrière la scène, cinq rues, trois au centre, une sur chaque porte latérale. La scène est traitée comme si elle était la place publique d’une ville et les rues de cette ville idéale – Thèbes en l’occurrence - sont rectilignes, bordées de riches palais en alignement. D’autres réalisations urbaines existent à l’image de Pienza. En 1565, le Grand Maître de l’Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, Jean Parisot de la Valette et son architecte italien, Francesco Laparelli, imposèrent pour la construction de leur nouvelle cité, à Malte, un plan en damier, l’alignement strict des façades, l’absence de jardins en devanture ainsi que de tout espace séparant deux maisons successives, la présence d’une cour intérieure. Cela répondait certes à des objectifs de défense militaire, mais faut-il souligner que Laparelli était toscan, originaire de Cortone, à quelques portées de canon de Pienza ? De même, le prince Vespasiano Gonzaga Colonna, en 1577, fit construire sur la base des mêmes principes une ville idéale, Sabbionetta, dans la plaine du Pô, surnommée « La petite Athènes ». 

 

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