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Notes d'Itinérances
26 juin 2021

Sant'Eustachio - Entre Navone et Panthéon (2/14). Le Palais Madame sur lequel veillent de fiers carabiniers.

Un palais des Médicis - Où habita une future Reine de France

 

 

Le tour du quartier Sant’Eustachio commence bien évidemment à la piazza Navona bien que celle-ci fasse partie du rione (arrondissement) voisin de Parione. La municipalité de Rome a finalement interdit aux automobilistes d’utiliser la Piazza Navona comme parking ce qui permet d’y développer d’autres activités, notamment dans les deux derniers mois de l’année le marché de Noël qui s’empare de la place, mondialisation oblige, avant la fête traditionnelle de la Befana pour l’épiphanie. Un petit tour de la place, rien que pour le plaisir, avant de sortir côté Est vers le Palais Madame, siège du Sénat, ce qui explique la présence des carabiniers.

 

Au premier coup d’œil, le Palais Madame semble être un palais baroque par la richesse de son ornementation : corniche à consoles, frise décorée de putti, frontons courbes ou triangulaires selon les étages, encadrements des fenêtres en forme de cariatides (photo). Pourtant le premier noyau du palais date de la fin du XVe / début XVIe siècles ! La comparaison avec le Palais de la Chancellerie (1483 / 1511) souligne qu’il y a donc là quelque chose d’incongru. L'évêque de Chuisi, Sinulfo de Castell'Ottieri, trésorier du pape Sixte IV della Rovere (1471 / 1484), acquit un terrain en bordure de la « place Lombarde » (l’ancien nom de la piazza Madama) pour se construire un petit palais. L'édifice fut achevé en 1505 par le cardinal Jean de Médicis, fils de Laurent de Médicis et futur pape sous le nom de Léon X (1513 / 1521). Celui-ci fit modifier le bâtiment par Giuliano da Sangallo. A la mort de Léon X, le Palazzo Madama est devenu propriété de son cousin, Jules de Médicis, lequel devint ensuite pape sous le nom de Clément VII (1523 / 1534). Être pape était alors une affaire de famille !

 

Catherine de Médicis (1519 / 1589), fille de Laurent II de Médicis, future épouse d’Henri II et reine de France, séjourna dans le palais de 1530 à 1532.

 

« La Duchesse est dans sa treizième année ; elle est très-vive, montre un caractère affable et des manières distinguées. Elle a reçu son éducation auprès des nonnes de Florence de l'ordre des Murate, femmes d'une réputation excellente et d'une sainte vie. Elle est petite de stature et maigre ; ses traits ne sont pas fins, et elle a les yeux saillants, comme la plupart des Médicis » [1].

 

A la mort de Clément VII, c’est Alexandre de Médicis qui hérite du palais puis, après son assassinat par son cousin Lorenzino de Médicis [2] en 1537 (les assassinats étaient aussi des affaires de famille !), sa femme Marguerite de Parme (1522 / 1586), fille naturelle de Charles Quint. Marguerite de Parme, connue aussi sous le nom de Marguerite d’Autriche, était un beau parti que le pape Paul III Farnèse (1534 / 1549) ne voulait pas voir s’échapper et il la maria à son petit-fils Octave Farnèse ! Elle se retrouva au nœud d’intrigues complexes pour l’indépendance de son petit État de Parme et Plaisance, un coup contre le pape, grand-père de son mari, et un autre contre Charles Quint, son père ! Elle aimait se faire appeler « Madama » d’où le nom du palais. Le palais est resté aux Médicis et aux grands-ducs de Toscane jusqu'au XVIIIe siècle. En 1642, une façade baroque, conçue par Paul Marucelli, a été érigée. En 1755, le palais a été acheté par le pape Benoît XIV Lambertini (1740 / 1758) et il accueillit notamment le greffe et le siège de la police. De cette destination de l'édifice vient le terme parfois utilisé aujourd'hui à Rome pour définir la police « La madama ».

 

Le Caravage habita une petite chambre dans les étages supérieurs quand, en 1595, il rentra au service du cardinal Francesco Maria Del Monte, fervent défenseur du parti français au sein de la papauté, qui y habitait. Del Monte défendra son protégé pour lui faire obtenir la commande de la décoration d’une chapelle de l’église Saint-Louis-des-Français portant sur l’histoire de saint Matthieu.

 

La large avenue qui longe le palais Madama, le corso del Rinascimento (cours de la Renaissance), est une création toute fasciste de 1936 ! Il s’agissait d’un projet, heureusement non finalisé, d’aller au plus droit du quartier de Prati au Nord à celui du Trastevere au Sud en taillant par le vide dans les plus vieux quartiers de Rome, parmi églises et palais des XVIIe et XVIIIe siècles !

 


[1] Antonio Soriano. Cité par A. De Reumont. « La jeunesse de Catherine de Médicis ». 1866.

[2] Généralement plus connu sous le nom de Lorenzaccio. Voir le drame qu’en tira Alfred de Musset (1834).

 

Liste des promenades dans Rome et liste des articles sur Sant'Eustachio

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