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Notes d'Itinérances
16 février 2024

Sant'Angelo - Autour du ghetto (12/18). Le palais Mattei Paganica et la Crypte Balbi.

Des fouilles minutieuses pour rendre compte des évolutions millénaires du quartier

 

 

La Via Paganica relie la piazza Mattei à la via delle Botteghe oscure. Elle doit son nom au palais de la famille Mattei, ducs de Paganica, lequel fait partie de « l’ilot Mattei » avec les palais de Giacomo Mattei, Mattei di Giove et Alessandro Mattei. Situé sur le côté droit de la rue, ill a été construit en 1541 sur un projet attribué soit à Nanni di Baccio Bigio, soit à Vignola. La propriété du bâtiment passe aux autres branches Mattei puis, en 1928, à l'Institut de l’Encyclopédie Italienne [1]. La grande façade comporte quatre étages de fenêtres : au rez-de-chaussée des fenêtres encadrées avec des architraves et des garde-corps sur encorbellements et de petites fenêtres en dessous, au premier étage des fenêtres architravées, au deuxième étage, une mezzanine avec des fenêtres carrées, au troisième étage des fenêtres encadrées. Un portail, surmonté d’une l'inscription (Ludovico Mattei, fils de Pietro Antonio et neveu de Ludovico) et d'un balcon, mène à une cour intérieure avec un double ordre de loggias. Les salles sont décorées de frises attribuées à la famille Zuccari, avec une Histoire de David, des scènes bibliques et des armoiries de Mattei.

 

Côté gauche, au n°9, s’est ouverte une nouvelle galerie d’art contemporain, la Galleria Sospesa.

 

Dans l’antiquité, le quartier était occupé par un théâtre, construit en 13 av. J-C, par Lucius Cornelius Balbus Minor, un banquier ami d’Auguste, après sa victoire sur les Garamantes, une population berbère de Lybie. Le théâtre pouvait accueillir 7 700 spectateurs et était richement décoré. Détruit en 79, des éléments du théâtre sont visibles dans le musée Crypta Balbi [2]. Pour la première fois à Rome, des fouilles archéologiques minutieuses ont permis, dans les années 1980, de rendre compte des évolutions de la ville dans ses différents strates [3]. Elles ont pu être conduite sur une surface de plus de 3 000m2, suite à la démolition des structures du Conservatoire de Santa Caterina della Rosa effectuée au début des années 40. 

 

A l’origine, la zone comprenait des cours d’eau et des marécages. Elle aurait été le théâtre de cultes païens avant de devenir un terrain destiné aux entrainements militaires romains. Initialement vierge de tout édifice, elle fut ensuite consacrée à des temples et des sanctuaires. A l'époque de la République romaine, une partie de la zone devait être occupée par les terrains de la Villa publica. A l'époque d'Auguste, le théâtre y fut construit, partiellement conservé sous le palais Mattei-Caetani. Entre le Ve siècle et le Moyen-Âge, les renseignements sur la zone sont moins nombreux par suite de bouleversements importants : tremblements de terre (particulièrement en 408), destructions violentes (saccages des Wisigoths et des Vandales) et fréquentes inondations du Tibre qui contribuèrent à rehausser le niveau du sol. Au cours du Moyen-Âge, un fortin s'éleva sur les ruines du monument antique (Castrum Aureumsoit Fort doré !), à l'intérieur duquel deux églises furent construites, dédiées l’une à sainte Marie et l’autre à saint Laurent. Du XIIe et le XVe siècles, se succédèrent dans la zone, outre des maisons d'habitation, diverses activités productives dont celles des Funari (cordiers) dont le souvenir demeure attaché au toponyme. C'est de cette période que provient l'appellation de la rue « apoteca oscura » (boutiques obscures), qui désignait les lieux occupés par des commerces dans les salles à semi-enterrées du monument antique. Au XVIe siècle, la création du bâtiment du Conservatoire de Santa Caterina della Rosa, connu sous le nom de « Compagnie des vierges misérables » et fondé par saint Ignace de Loyola, impliquait la destruction des bâtiments médiévaux. Il était annexé à la nouvelle église de Santa Caterina dei Funari qui remplaçait l'antique église de Santa Maria (1564). Le Conservatoire, destiné à accueillir des fillettes, filles de prostituées, fut agrandi au XVIIe siècle et était resté presque intact jusqu'aux campagnes de dégagement et de destruction du centre historique menées par le gouvernement fasciste.

 


[1] Le palais Mattei de Paganica accueille l'Espace Treccani Arte dans les pièces du rez-de-chaussée, accessibles gratuitement au public, avec des expositions visant à promouvoir l’art contemporain.

[2] Museo Nazional Romano – Crypta Balbi. Le Musée National Romain comprend quatre sites : les thermes de Dioclétien (stèles antiques et préhistoire du Latium), le Palais Massimo alle Terme (numismatique, orfèvrerie, art antique avec portraits, mosaïques et fresques), le Palais Altemps (sculptures antiques et la collection égyptienne) et la Crypte Balbi (laboratoire archéologique), .

[3] Daniele Manacorda. « L'enquête archéologique dans la zone de la Crypta Balbi ». In « Les Nouvelles de l'archéologie ».  n°13. 1983.

Brice Gruet. « De la ville antique à la ville médiévale ». In « La rue à Rome ». PUPS. 2006.

 

iste des promenades dans Rome et liste des articles sur Sant'Angelo et le ghetto

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