Sallustiano - Un quartier d'administrations (5/11). Les jardins de la villa de Salluste puis de la villa Ludovisi.
Une zone de jardins luxueux aux temps des Romains puis de la papauté
Dans la Rome antique, les jardins de Salluste occupaient une vaste zone au nord de Rome, entre les collines du Pincio et du Quirinal (rioni actuels de Ludovisi et de Sallustiano). Salluste (86 avant J.C / 34 avant J.C) était un militaire et un sénateur de la République romaine, ami de César. Pas nécessairement heureux sur les champs de bataille, il est néanmoins élu préteur en – 47 et accompagne César en Afrique où il se voit confier le gouvernement de la nouvelle province romaine de Numidie en – 46 / - 45. Après l'assassinat de César, en mars 44 av. J-C, Salluste comprend que sa carrière politique se termine et préfère se retirer de la vie publique et profiter de la fortune acquise (frauduleusement notamment !) au cours de son gouvernement provincial en Afrique. Il est surtout connu aujourd’hui comme historien avec le récit de la conjuration de Catilina et de la guerre contre le roi numide Jugurtha.
Militaire, Salluste affirme le principe que « la paix est l’intervalle de temps entre deux guerres » ! Définition dont l’esprit se retrouve encore dans le Grand Larousse : « État d’un pays qui n’est pas en guerre » ! Autrement dit, on ne sait pas définir la paix autrement que par la négation d’un état que l’on sait, lui, définir et qui apparaît normal, la guerre ! C’est à la fois très inquiétant et révélateur.
Revenons à Salluste. Les jardins de Salluste ont la réputation d’avoir été parmi les plus grands et les plus riches du monde romain, comparables à ceux de la Villa de Lucullus sur la colline du Pincio. Ils échurent ensuite successivement aux empereurs Auguste, puis Vespasien, Nerva, Hadrien, et enfin Aurélien avant de passer dans le domaine impérial sous Tibère.
Au centre de la piazza Sallustio, à une profondeur de 14 mètres, on peut voir les vestiges de la villa du domaine, refaite en grande partie sous Hadrien et restaurée par Aurélien (photo). Elle a été ensuite endommagée lors du sac de Rome par les Wisigoths d'Alaric en 410. Le pavillon de la villa, achevé sous le règne d'Hadrien, était comparé pour sa beauté au Canope de la villa Adriana à Tivoli. Il demeure des éléments d’une pièce circulaire dotée d’une coupole, d’un vestibule et de chambres avec des traces de peintures et des pavements de mosaïque noire et blanche.
Dans des vignobles, sur l’emplacement des jardins de Salluste, le cardinal Ludovico Ludovisi fait construire, dans les années 1620, une villa dont les plans de construction sont dessinés par Carlo Maderno et peut-être le Dominiquin. Très vastes les jardins de la villa occupaient ceux des anciens jardins de Salluste. C’est dans ce jardin, qu’au cours du XVIIe siècle, furent retrouvés des sculptures remarquables qui permirent à la famille Ludovisi de se constituer une collection d’antiques avec, par exemple, "Le Gaulois mourant" ou "Le Gaulois et sa femme", une copie romaine d'une œuvre hellénistique, mais aussi l’obélisque de la Trinità dei Monti érigé en 1789. La propriété de la villa passe ensuite à la famille Boncompagni-Ludovisi qui, en 1872, la loue au roi Victor Emmanuel II comme résidence pour sa maîtresse. Suite à de graves difficultés financières les Boncompagni-Ludovisi vendent, en 1883, la villa et les 4/5 du parc (25 ha) à une société immobilière qui trace de grandes avenues, comme la via Vittorio Veneto, et lotit les terrains. La Villa Ludovisi est entièrement détruite, seul est conservé le « Casino dell'Aurora » (Rione Ludovisi, via Aurora) nommé ainsi d'après la fresque du Guerchin qui décore l'édifice. Le casino comporte également une fresque du Caravage, la seule connue de cet artiste, représentant Neptune et Pluton, ainsi qu’une chambre dite « des paysages » qui aurait servi de concours entre quatre peintres pour la fresque de l’Aurore, Le Guerchin, Bril, Viola et le Dominicain, avec une décoration au centre du plafond d’une danse de putti.
« Ce matin, nous avons revu la villa Ludovisi ; nous sommes plus charmés que jamais des fresques du Guerchin ; c’est une passion subite qui, chez une de nos amies, va jusqu’à l’exaltation. C’est un peu ce qu’en amour on appelle le coup de foudre » [1].
L'État italien avait acquis une grande partie de la collection d’antiques des Ludovisi laquelle est présentée aujourd’hui dans les salles du palais Altemps (rione Campo Marzio).
[1] Stendhal. « Promenades dans Rome ». 1829
Liste des promenades dans Rome et liste des promenades dans Salustiano