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Notes d'Itinérances
19 mai 2018

Cameroun - Années 80 (10/34). Ouest Cameroun - « Chantiers » et « poulet-bicyclette ».

Autres lieux autres formes de loisirs 

 

Cameroun Sud Chantier

 

Si on vous le propose, n’hésitez pas à aller au chantier ! On ne vous y donnera pas une pelle ou une pioche, mais une bière bien fraîche. C’est quand même plus agréable et démontre simplement que les Camerounais savent mieux vivre. 

 

Les « chantiers » ce sont de petites gargotes, tenues généralement par des femmes, souvent des veuves, dans leur maison d’habitation. Les chantiers permettent à ces femmes de percevoir des revenus car les retraites et les pensions de réversion n’existent tout simplement pas en Afrique. A Yaoundé, les chantiers peuvent également être appelés « Chez les veuves » ou « Aides-mamans ». Cela veut tout dire de leur fonction principale. Par ailleurs les chantiers permettent aux travailleurs camerounais, manœuvres, ouvriers ou employés de faire un repas « comme à la maison » et à bas prix.

 

La salle de restaurant peut occuper plusieurs des pièces de la maison, le plus souvent une terrasse ou une partie du jardin, ou seulement la pièce principale de l’habitation. Le « chantier » n’est pas toujours signalé à l’extérieur, quelquefois il l’est par une enseigne, parfois il n’y a seulement que le panneau publicitaire d’une marque de bière, mais fréquemment aucun indice particulier ne le signale.

 

On parle aussi de « circuit », ce qui fait référence à l’ensemble des bars, plus ou moins clandestins, qu’un homme fréquente à la sortie de son travail avant de rentrer chez lui.

 

Dans les chantiers vous aurez l’occasion de boire une bière ou un soda, mais aussi de manger du poisson grillé ou de goûter au fameux « poulet bicyclette », appelé ainsi parce que c’est un poulet qui a de longues pattes et qui court beaucoup. Le pauvre a d’ailleurs grand intérêt à le faire s’il ne veut pas mourir de faim, car ici pas question de cage certes, mais pas d’alimentation automatique non plus. C’est la dure lutte quotidienne pour la vie. C’est un poulet « garanti élevage en plein air » même si, à la vente, il ne porte pas de macaron précisant le label et la norme NF. Je ne suis pas certain par contre qu’il puisse être labélisé « biologique » car l’on ne sait pas trop de quels déchets divers il a pu se nourrir, ni où il a pu traîner ses pattes. 

 

A part cela, le poulet se prépare comme en Europe sauf que, débarrassé de ses plumes après un léger trempage dans l’eau chaude, il n’en reste plus grand chose. Nous l’appellerions plutôt « coquelet », voir « grosse caille ». Après l’avoir plumé, vous coupez les pattes et la tête, le videz, le lavez. Vous l’enduisez ensuite d’une fine couche d’huile légèrement salée et le cuisez sur votre barbecue fait d’une moitié d’un de ses gros bidons métalliques d’huile de vidange ou de produits pétroliers. Vous pouvez aussi le préparer en le coupant en morceaux. Quand vous servez le poulet braisé à vos invités, il convient de faire attention à réserver le croupion aux hommes sages et âgés et il est très inconvenant que les jeunes ou les femmes mangent le sot-l’y-laisse.

 

Si, quand vous avez été servi, vous êtes surpris par le petit volume de la bête en regard de nos standards européens, vous allez connaître une seconde surprise à la dégustation avec la très forte résistance de la viande. Le poulet continue à se défendre jusque dans votre assiette ! Certes, il y a un peu de viande autour des os, mais ferme, solide, rendant indispensable l’intervention directe des mains et des dents. Dentiers mal accrochés, danger ! Il n’est pas du genre à s’effilocher tout seul dans votre assiette comme nos poulets industriels traités aux antibiotiques, dopés aux vitamines, gavés aux tourteaux de soja et aux farines de viande, élevés en batterie, mais certes emballés dans de la cellophane, calibrés, contrôlés, étiquetés, labellisés et affublés d’un code barre.

 

Pour aider à la dégustation, le poulet est accompagné de la boisson nationale, la bière, une « 33 » ou une « Spéciale », mais en rations d’un demi-litre. Assez peu alcoolisée, elle se boit finalement très facilement ! La « 33 » est la bière la plus connue et la plus populaire au Cameroun. De marque française à l’origine, elle est de type Lager. Sa licence est vendue par le groupe Heineken International à plusieurs brasseurs dont Les Brasseries du Cameroun.

 

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Commentaires
M
Tombée par hasard sur cet article, je l'ai trouvé très intéressant ; cette explication des "chantiers" qui aide les femmes seules c'est génial. Et le pauvre poulet bicyclette m'a fait mal au coeur, tout maigre sous ses plumes... :-) Le style d'écriture est agréable à lire, je vais continuer mon "voyage" au Cameroun. Bonne journée.
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